1999
La "tempête
du siècle"

Les 26, 27 et 28 décembre 1999, deux tempêtes se sont abattues sur la France. Retour sur ce phénomène qui a marqué nos départements
et provoqué d'énormes dégâts.

Archives Le Progrès

C'était il y a vingt ans. Une tempête en deux temps, comme on en voit tous les mille ans en Europe.

LOTHAR

Formée au large du Canada, la première tempête baptisée Lothar fait son apparition en France le 26 décembre 1999. Elle touche d'abord la Bretagne, puis l'Île de France, et enfin l'Est de l'Hexagone.

Le Jura fait partie des régions de France les plus touchées.

MARTIN

C'est le nom de la deuxième tempête qui s'abat sur nos départements dans la nuit du 27 au 28 décembre 1999. Celle-ci balaye le pays, du Sud-Ouest à la région lyonnaise.

Le Rhône, la Loire, le Jura et la Haute-Loire sont sinistrés. Seul le département de l'Ain est majoritairement épargné.

Un phénomène hors du commun

D'une intensité exceptionnelle, ces tempêtes sont classées "force 12", le maximum sur l'échelle de Beaufort qui mesure la force des vents en mer.

Autre caractère extraordinaire : les vents supérieurs à 120 km/h ont atteint les deux tiers des départements français. Soixante-neuf d'entre eux ont fait l'objet d'un arrêté de catastrophe naturelle.

La Une du Progrès le 27 décembre 1999.

La Une du Progrès le 27 décembre 1999.

Une tempête historique

En France, les rafales de vent ont atteint
des valeurs record : 184 km/h sur l'île d'Ouessant
et entre 120 et 170 km/h dans le Nord.

Et dans nos départements ?

GIF Météo France
« C'est une tempête à l'extrême du possible en Europe. Elle ne peut pas être comparée à un cyclone, qui se déplace très lentement. C'est d'ailleurs sa vitesse qui l'a rendue encore plus dangereuse. »
Hubert Brunet, chef prévisionniste à Météo France

Cela faisait cinquante ans que la France n'avait pas connu pareille tempête, jugée "historique" par les météorologues de l'époque.

Après son passage, le bilan humain est lourd dans l'Hexagone : 92 morts.

Dans nos départements, personne n'a trouvé la mort. Toutefois, des personnes ont été blessées.

« Je m'en souviens comme si c'était hier. Je gardais mon petit-fils de 3 ans à Briennon (Loire) dans une propriété avec beaucoup d'arbres. J'ai passé la nuit toute habillée, dans la chambre à côté de mon petit-fils, heureusement endormi. J'étais prête à partir. Puis j'ai entendu un bruit terrible : un arbre était tombé sur la maison de maître. On n'a plus eu de lumière pendant un moment. »
Marie-Anne Berland, témoin de la Loire

Coincé sous un arbre

A Saint-Vérand (Rhône), un pompier volontaire a été gravement blessé alors qu'il était en opération dans la nuit du 27 au 28 décembre.

A Saint-Vérand, l'endroit où le pompier rhodanien a été gravement blessé. Photo d'archives Le Progrès

A Saint-Vérand, l'endroit où le pompier rhodanien a été gravement blessé. Photo d'archives Le Progrès

En 2013, il a témoigné pour Le Progrès : « Il a suffi d'une nouvelle rafale de vent et l'arbre qui menaçait la route et dont nous coupions les branches est brusquement tombé. Je me suis retrouvé coincé dessous, plaqué au sol, inconscient ».

Résultat : un traumatisme facial, et un tibia et un péroné cassés. Il a été maintenu dans un coma artificiel pendant dix jours.

Un sapin lui tombe dessus

À Charnoz-sur-Ain (Ain) aussi, un pompier a été blessé.

Alors qu'il travaillait sur la route départementale 65, au niveau du château de Messimy, un sapin lui est tombé dessus. Il a eu le pied cassé.

Une tuile sur la tête

A Dole (Jura), une femme a été plus légèrement touchée.

Elle marchait dans le quartier de la gare lorsqu'elle a reçu une tuile sur la tête. Les secours l'ont transportée à l'hôpital.

Dans nos départements, les pompiers sont restés mobilisés plusieurs jours pour porter secours aux habitants. Leurs interventions se comptent par milliers.

Dans le Jura, douze centres de secours ont été mobilisés. En une journée, les soldats du feu ont reçu 800 appels : « Cela équivaut à 5% de l'activité annuelle », commentait le commandant Spies.

Regardez le reportage télévisé réalisé, à l'époque, avec les pompiers jurassiens :

« La tempête n'est pas aussi catastrophique chez nous qu'elle l'a été dans d'autres départements où l'on compte des morts. Et elle a permis aux gens de réapprendre la solidarité. »
Charles Brechard, à l'époque maire de Chamelet (Loire) et conseiller général
A la mairie d'Oingt (Rhône), les pompiers ont monté une cellule de crise. Photo d'archives Le Progrès

A la mairie d'Oingt (Rhône), les pompiers ont monté une cellule de crise. Photo d'archives Le Progrès

A la mairie d'Oingt (Rhône), les pompiers ont monté une cellule de crise. Photo d'archives Le Progrès

A La Talaudière (Loire). Photo d'archives Le Progrès

A La Talaudière (Loire). Photo d'archives Le Progrès

Une France paralysée

Au lendemain de Noël, les tempêtes Lothar et Martin paralysent le pays. Plus de 3 millions de foyers sont privés d’électricité, les routes et lignes téléphoniques sont coupées et les transports très impactés.

A la gare Part-Dieu. Photo d'archives Le Progrès

A la gare Part-Dieu. Photo d'archives Le Progrès

Des chutes d'objets et d'arbres sur les voies ferrées ont mis à mal le réseau de la SNCF.

A Lyon

Le 26 décembre, plusieurs centaines de voyageurs se retrouvent bloqués dans la capitale des Gaules.
Certains à l'aéroport de Satolas, d'autres à la gare Part-Dieu.

Des voyageurs en provenance de la vallée du Rhône, de Genève et des stations de ski alentours sont débarqués à la gare lyonnaise. Aucun accès vers le Nord, l'Ouest ou Paris n'est assuré : le trafic ferroviaire est interrompu.

La nuit du 26 au 27 décembre, la SNCF doit loger plus de 500 personnes coincées à Lyon. Même chose la nuit suivante. Cette fois-ci, 10.000 voyageurs sont logés par la société ferroviaire.

A Saint-Étienne aussi le trafic est impossible. La gare de Chateaucreux est fermée.

Il aura fallu attendre le 31 décembre 1999 pour que 95% du trafic SNCF soit de nouveau assuré.

400 millions de francs

C'est le montant des dégâts provoqués par la tempête
sur le réseau ferroviaire français. Soit l'équivalent de 80 millions d'euros.

Électricité : un chantier titanesque

Si les routes ont été peu abîmées, le réseau de distribution et de transport d’électricité, lui, a souffert. Pylônes à terre, câbles arrachés... Des milliers de foyers se retrouvent dans le noir pour passer les fêtes.

Les dégâts après la tempête. Photo EDF/Thierry ARDOUIN

Les dégâts après la tempête. Photo EDF/Thierry ARDOUIN

Dans le Rhône, les dégâts ont été nombreux : sur les 89 communes que compte le Beaujolais, 70 ont été victimes de coupure de courant.

Dans le Jura, le préfet a même déclenché le plan "électro secours" qui met à disposition des usagers et hôpitaux des groupes électrogènes.

Dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, on compte 52 lignes à haute tension et très haute tension touchées sur les 1.108 lignes présentes dans le secteur, et 64 pylônes hors d'usage sur 3.500.

Les trois quarts du territoire français sont concernés.
Pour RTE (Réseau de transport d'électricité), c'est un chantier titanesque.

50.000 professionnels sont déployés sur le terrain 24h/24h. Une forte mobilisation qui permet de récupérer 90% des lignes électriques endommagées en quatre jours. Et de rétablir l'intégralité du réseau dès la première semaine de janvier 2000.

D'innombrables dégâts

Dans nos départements, les fortes rafales de vents se sont attaquées aux toitures. Les propriétaires
et assureurs s'en souviennent encore.

Dans le Rhône, un résineux de 185 ans est tombé sur le château de Letra. Photo d'archives Le Progrès

Dans le Rhône, un résineux de 185 ans est tombé sur le château de Letra. Photo d'archives Le Progrès

Une fois la tempête passée, le constat est à la désolation.

Dans la Loire

Le 28 décembre, dans les rues de Montbrison, Feurs, Saint-Étienne et Saint-Galmier, le spectacle est identique : les toitures sont éventrées et laissent à nu les charpentes.

A Montbrison, le toit de l'église n'a pas résisté.
Regardez :

A Montbrison (Loire), le toit de l'église Notre-Dame n'a pas résisté aux fortes rafales de vent. Photo d'archives Le Progrès

A Montbrison (Loire), le toit de l'église Notre-Dame n'a pas résisté aux fortes rafales de vent. Photo d'archives Le Progrès

500 millions de francs

C'est, dans la Loire, le montant des dégâts estimé sur les toitures. Soit, l'équivalent de 100 millions d'euros.

Une toiture arrachée dans le Forez (Loire). Photo d'archives Le Progrès

Une toiture arrachée dans le Forez (Loire). Photo d'archives Le Progrès

Ailleurs

Dans le Jura, huit écoles ont subi la violence de la tempête. La toiture du Palais de justice de Lons-le-Saunier a, elle aussi, été endommagée.

Dans le Rhône, le toit de l'église d'Oingt a été abîmé tout comme celui du château de Letra sur lequel un arbre de 185 ans est tombé.

Certains témoins évoquent "une ambiance de guerre".

150 m²

C'est la superficie de toitures arrachées dans la commune
de Sainte-Foy-lès-Lyon, dans le Rhône.

« J'habitais à Sainte-Foy-lès-Lyon, je me souviens des sapins déracinés. L'un d'entre eux a même basculé sur un bâtiment dans le quartier Les Provinces. L'arbre a bouché un balcon. Il y a eu plus de peur que de mal. »
Frédérique Giraudier, témoin

A Sorbiers, dans la Loire, la chute d'un arbre a détruit la toiture d'une maison. Photo d'archives Le Progrès/Claude ESERTEL.

A Sorbiers, dans la Loire, la chute d'un arbre a détruit la toiture d'une maison. Photo d'archives Le Progrès/Claude ESERTEL.

En France, jamais les compagnies et mutuelles n'ont eu à indemniser autant de sinistrés : 3 millions de foyers ou d'entreprises pour une facture de 7 milliards d'euros.

Des forêts dévastées

Au total, en France, 60 millions d'arbres ont été arrachés et 138 millions de m³, abattus.
Soit 17% de la forêt française.

Vue aérienne des dégâts occasionnés par la tempête dans le Beaujolais. Photo d'archives Le Progrès

Vue aérienne des dégâts occasionnés par la tempête dans le Beaujolais. Photo d'archives Le Progrès

Dans la forêt jurassienne de Mignovillard. Photo d'archives Le Progrès

Dans la forêt jurassienne de Mignovillard. Photo d'archives Le Progrès

1,3 million de m³

C'est la quantité de douglas détruits dans la zone Rhône-Ardèche-Loire. Pour le seul département du Rhône, cela représente la perte de 20% des réserves (33% pour les coteaux du Beaujolais).

Les Monts du Beaujolais

Les Monts du Beaujolais se sont retrouvés "chauves". Cette région a supporté, à elle seule, 90% des dégâts forestiers observés dans le Rhône.

Déracinés, arrachés, sectionnés, 8.000 hectares (principalement de résineux) ont disparu du paysage. Soit la perte de plus de sept ans de récolte. Un taux de dégât qui se situe parmi les plus élevés de ceux constatés en France.

« Les plus impactés par la tempête ont été les propriétaires forestiers privés »
Guillaume Béal, responsable de l'unité territoriale de l'ONF du Rhône

Guillaume Béal est responsable de l'unité territoriale de l'ONF (Office national des forêts) du Rhône, une unité qui regroupe les départements de l'Ain, du Rhône et de la Loire. Il explique: « Dans le Rhône et la Loire, l'ONF ne gère que 5% des forêts. Dans l'Ain c'est un petit peu plus important (25 à 30%). Les plus impactés par la tempête de 1999 ont été les propriétaires forestiers privés ».

Le Jura

Le secteur de Champagnole a énormément souffert mais c'est la forêt de la Joux qui a payé le plus lourd tribut : 10 à 15% de la forêt se retrouvent à terre.

Vingt kilomètres plus loin, dans la forêt communale de Mignovillard, le constat est effarant : la perte représente presque dix ans de coupes habituelles.

Les dégâts dans les forêts du département sont catastrophiques. Découvrez les images de France 3 diffusées le 28 décembre 1999 :

« Dans la forêt de Mignovillard,
certains usagers voulaient continuer à skier »
Patricia Nicot, à l'époque cheffe de division pour l'ONF à Poligny

Patricia Nicot, à l'époque cheffe de division pour l'Office national des forêts (ONF) à Poligny, se souvient : « Au lendemain de la tempête, notre première préoccupation a été de sécuriser, pour les usagers, les accès des forêts publiques que nous gérons. La tempête avait provoqué un effet "Mikado". Des bois étaient tombés sur les routes, il était difficile de pénétrer au cœur des massifs ».

Il s'agissait également d'éviter le suraccident : « Dans la forêt de Mignovillard, certains usagers voulaient continuer à skier alors que c'était clairement impossible. »

De très nombreux résineux sont tombés. « Les résineux ont plus souffert que les feuillus parce qu'ils sont plus grands. Leur taille de 35, 40 mètres de haut augmente leur prise au vent", explique Patricia Nicot. »

Ailleurs

Dans l'Ain, on estime qu'un quart de la production annuelle a été mis à terre.
Les secteurs les plus touchés ? Les hauteurs d'Oyonnax vers Echallon, le col de la Faucille, La Vattay et le plateau d'Hauteville.

Dans la Haute-Loire, la répartition des dégâts est très partagée.
Le nord du département est plus atteint que le sud. Et pour cause, les deux tiers de l'Auvergne se sont trouvés dans l'axe des vents forts. Seuls la moitié nord de l'Allier et l'extrême sud de la région ont été épargnés.

Photo d'archives Le Progrès

Photo d'archives Le Progrès

Dans l'Ain, au château de Fleyriat, dans la commune de Viriat. Après la tempête, le propriétaire confiait dans nos colonnes : "Des espèces rares qui ont plus de 200 ans et qui font plus de 30 mètres de haut sont tombées".

Dans la Loire. Photo d'archives Le Progrès

Dans la Loire. Photo d'archives Le Progrès

Au lendemain de la tempête, à Pélussin, dans la Loire.

Au parc de la Tête d'Or, à Lyon. Photo d'archives Le Progrès/Damien LEPETITGALAND

Au parc de la Tête d'Or, à Lyon. Photo d'archives Le Progrès/Damien LEPETITGALAND

Un arbre centenaire déraciné dans le parc de la Tête d'Or à Lyon.

L'après tempête

Comment la filière bois s'est-elle relevée ?

Météo France et RTE en ont tiré des leçons. Lesquelles ?

"Sympathie et compassion"

Le 28 décembre 1999, le président de la République Jacques Chirac prend la parole sur le JT de France 3. Il en profite pour évoquer le phénomène de marée noire provoqué par le pétrolier Erika le 11 décembre : « La France est blessée, beaucoup de Français sont cruellement atteints ».

Regardez :

La filière bois

12 janvier : le gouvernement débloque 1,6 milliard de francs (320 millions d'euros) de subventions et 12 milliards de prêts bonifiés pour financer le nettoyage des forêts.

Pour la filière bois, les dégâts sont estimés à 20 milliards de francs (environ 4 milliards d'euros).

Déblaiement en cours dans une forêt du Rhone. Photo d'archives Le Progrès

Déblaiement en cours dans une forêt du Rhone. Photo d'archives Le Progrès

La commercialisation

Selon Patricia Nicot (ONF du Jura), « Il a d'abord fallu s'occuper des bois déracinés, les exploiter le plus rapidement possible pour éviter qu'ils se dégradent. Une fois passé l'hiver, ils allaient pourrir ».

La course contre la montre commence.

Seul hic : le marché du bois se retrouve saturé. Entre 1999 et 2000, en France, la vente de bois rond augmente de 15%.

Alors, pour étaler les ventes de bois, le Jura innove.

« Nous avons créé des aires de stockage sous aspersion (où les bois sont régulièrement arrosés d'eau). Elles nous ont permis de conserver des dizaines de milliers de m³ de bois en bonne santé pendant deux, trois ans. Ça n'existait pas dans le Jura. »
Patricia Nicot, ONF du Jura

Dans la forêt communale de Mignovillard (Jura). Photo d'archives Le Progrès

Dans la forêt communale de Mignovillard (Jura). Photo d'archives Le Progrès

Pour faciliter la commercialisation, des coopératives ont été créées.

Leur modèle ? Les fruitières à comté.

« Dans ces aires de stockage, nous avons regroupé des bois de plusieurs communes. Nous avons calculé les parts de chacun et redistribué les recettes au fur et à mesure des ventes. En parallèle, les communes qui n'ont pas été touchées par la tempête ont accepté de geler leurs coupes de bois. Cette solidarité nous a permis de limiter les dégâts. Le marché est revenu à la normale en 2003. »
Patricia Nicot, ONF du Jura

Dans le Rhône, la solidarité était aussi de mise. Les Monts du Beaujolais ont rapidement bénéficié des moyens importants d’exploitation forestière issus des grosses scieries de l’Ain et de l’arc alpin.

« L'expérience a montré que l'on était capable de faire face à des catastrophes climatiques grâce à une solidarité de tous les acteurs de la filière bois. »
Pierre Brégand, à l'époque maire de Censeau (Jura)

La reconstitution

Quatre mois après la tempête, le gouvernement présente son projet de loi pour la filière bois.

Regardez le JT de France 2 daté du 12 avril 2000 :

1,7 million d'euros

C'est le coût des travaux de reconstitution
de la forêt départementale du Rhône.

Dans le Rhône, un long travail de réflexion a précédé la phase de reboisement. Trois objectifs ont été fixés par le Département :

  1. Conserver la vocation économique de la forêt,
  2. Améliorer les conditions d'accueil du public,
  3. Protéger la biodiversité.

Un engin déblaie une forêt du Rhône. Photo d'archives Le Progrès

Un engin déblaie une forêt du Rhône. Photo d'archives Le Progrès

« Au vu de l'événement climatique de 1999, il est clair que n'importe quelle essence serait tombée sous des vents aussi puissants. »
Guillaume Béal, ONF Rhône-Ain-Loire

« La majorité des zones touchées, et dont nous avons la gestion, se sont régénérées naturellement, déclare Guillaume Béal. Pour les autres, nous avons dû reboiser de façon artificielle avec des douglas, sapins, mélèzes, chênes, châtaigniers... »

Au final, dans le Rhône, 3.000 hectares de forêts sinistrées ont été reconstitués. Soit 70% des surfaces rasées par la tempête.

Aujourd'hui

Il aura fallu plus d'une décennie pour que nos forêts pansent leurs plaies. Toutefois, encore aujourd'hui, des traces de la tempête sont encore visibles.

« On ne voit plus de morceaux de bois pourris. En revanche, certaines forêts sont devenues, par endroits, beaucoup plus claires. Cette tempête a même permis de rajeunir certaines parcelles. »
Patricia Nicot, ONF du Jura
« Tout doucement, la forêt cicatrise. Mais, aujourd'hui, ce qui nous préoccupe vraiment, c'est le dépérissement des arbres lié au réchauffement climatique. Le regret qu'on peut avoir c'est de ne pas avoir, en 1999, replanté plus d'essences résistantes à la chaleur (des sapins méditerranéens, des cèdres, etc.). A l'époque, on parlait très peu du réchauffement climatique. Aujourd'hui, c'est notre cheval de bataille. »
Guillaume Béal, ONF Rhône-Ain-Loire

Un nouveau réseau pour RTE

A la suite de cette tempête d'une ampleur sans précédent, le réseau d'électricité doit être sécurisé. En septembre 2000 débute alors un ambitieux programme de renforcement du réseau. Il permettra notamment d'installer des lignes résistantes face à des vents de 180 km/h (contre 130 km/h en 1999).

2,8 milliards d'euros

C'est la somme qu'a coûté le programme de renforcement du réseau d'électricité français achevé en 2017.

La sécurisation de la ligne Avelin-Avelgem dans le Nord. Photo RTE / Stephane Harter

La sécurisation de la ligne Avelin-Avelgem dans le Nord. Photo RTE / Stephane Harter

La tâche est immense : il faut sécuriser 48.000 km de lignes en France. Cela représente 2 millions d'heures de travail.

Dans les années qui ont suivi 1999, RTE s'est engagé à enfouir 95% des nouvelles lignes d'électricité.

3.000

C'est le nombre de kilomètres de réseaux moyenne tension enfouis par RTE en 2008, en France. Depuis 2012, le groupe tente d'enfouir 5.000 kilomètres par an. Au total, 1.3 million de kilomètres devrait être enfoui.
Le coût ? Il est estimé à 100 milliards d'euros.

Fort de cette expérience, RTE assure qu'aujourd'hui : « En cas de tempête équivalente à celle de 1999, la consommation électrique de plus de 1,6 million de foyers est assurée en Auvergne-Rhône-Alpes ».

Après la tempête, dans le massif du Pilat. Photo d'archives Le Progrès

Après la tempête, dans le massif du Pilat. Photo d'archives Le Progrès

Des vigilances pour Météo France

«Il a été très difficile de prévoir l'intensité de la tempête. Il a suffi de très peu de choses pour que cette situation anodine devienne explosive.»
François Lalaurette, directeur des opérations pour les prévisions Météo France

En effet, quelques heures avant le passage de Lothar, les prévisions météorologiques ne soulevaient pas d'inquiétude. Pour preuve, la météo présentée dans le cadre du JT de France 2, le 26 décembre 1999. Patrice Drevet, le présentateur de l'époque, ne semble pas s'alarmer.

Regardez :

Il a fallu attendre le lendemain, jour du passage de la deuxième tempête, pour que Météo France publie un bulletin précisant les risques encourus par la population.

Pourquoi ? « Car, à l'époque, le dispositif de Météo France ne comportait pas de vigilance, répond François Lalaurette, directeur des opérations chez Météo France. On émettait des bulletins avec un contenu très technique envoyé à nos partenaires. Il n'y avait pas de communication adaptée pour le grand public

Pour y remédier, en mars 2001, l'Etat a donné des directives claires à Météo France. Et sept mois plus tard, les vigilances que l'on connait aujourd'hui ont fait leur apparition.

Depuis, le dispositif évolue régulièrement : « En 2004, on a ajouté la vigilance canicule et grand froid. En 2007, le risque de crues, et en 2011, le risque de vagues-submersions ».

Et aujourd'hui ?

« Nos prévisions ne sont toujours pas parfaites mais on est quand même beaucoup plus précis qu'à l'époque. On a rejoué le cas de la tempête de 1999 et si un tel phénomène se représentait aujourd'hui, on gagnerait 36 heures supplémentaires de prévisions.»
François Lalaurette, directeur des opérations pour les prévisions Météo France

Avec le réchauffement climatique, les phénomènes de tempêtes et vents violents sont-ils amenés à se répéter plus souvent ? « On ne peut pas le savoir car ces phénomènes ne sont pas directement reliés à la température de la surface de la mer », explique François Lalaurette.

Il ajoute : « Une chose est certaine : depuis les années 1980, Lothar et Martin sont les deux tempêtes les plus sévères qu'on ait jamais rencontrées ».