Dolmens, menhirs, mégalithes... des pierres de légende près de chez nous

Héritage des Celtes du néolithique, roches arrachées par les glaciers et sculptées par le temps... ces pierres, dressées par les hommes ou seulement remarquables, ont inspiré mille et unes légendes. Découvrez-les et parcourez notre carte interactive.

Les Rochers de Marlin dans le Pilat, ou l'Autel de la Baronnie dans le haut Forez, les mégalithes du Bois des Roches dans les monts du Lyonnais ou le chaos de Vauxrenard dans le Beaujolais, les Tombes des fées en Haute-Loire et les Commères du Jura, les roches semées par Gargantua dans l'Ain...

Nos départements ne peuvent pas rivaliser avec le Morbihan ou le Finistère côté menhirs, dolmens ou tumulus, pour autant les pierres dressées ou les mégalithes remarquables n'en sont pas totalement absentes. Elles font le bonheur des randonneurs, des historiens, des géologues...

Pour certaines, l'intervention de l'homme (des Celtes ou de leurs prédécesseurs le plus souvent) est attestée, quelques-unes sont mêmes classées aux Monuments historiques. Pour d'autres, difficile de savoir s'il faut attribuer les formes suggestives des roches aux rituels des druides ou aux glaciations des millénaires précédents...

Ou encore, comme les légendes l'ont fait, à Gargantua (connu pour semer des roches un peu partout), au géant Samson, à Satan, à Saint-Martin, ou à la fée Mélusine..

Menhir dit "la Déesse Alésia" à Crotenay (39).

Menhir dit "la Déesse Alésia" à Crotenay (39).

La Pierre du Diable, à Vulvoz (39).

La Pierre du Diable, à Vulvoz (39).

Le Dolmen de Roche-Cubertelle, à Luriecq (42).

Le Dolmen de Roche-Cubertelle, à Luriecq (42).

Le Dolmen dit la Roche aux Fées (ou de Châteauvieux) à Saint-Laurent-de-Vaux (69).

Le Dolmen dit la Roche aux Fées (ou de Châteauvieux) à Saint-Laurent-de-Vaux (69).

Dolmens, menhirs, mégalithes, et pierres remarquables de nos départements : notre carte interactive

Zoomez et cliquez sur les sites pour en savoir plus. En violet, les sites classés ou inscrits aux Monuments historiques.

Sale temps pour les fées en Haute-Loire...

Dolmen dit "la Thuile des fées" à Tailhac (43).

Dolmen dit "la Thuile des fées" près de Tailhac (43).

Dolmen dit "la Thuile des fées" près de Tailhac (43).

La légende dit « qu’autrefois par une nuit de pleine lune, alors qu’elles filaient la laine, le tonnerre gronda, qu’il y eut des éclairs et que le diable changea les fées en statues de pierre … hormis la reine qui s’échappa ! » Le dolmen dit "La Thuile des fées" est l'un des plus imposants qui subsistent en Haute-Loire : certaines dalles dépassent 3 m de long. Le dolmen et son tumulus, datés du néolithique, ont été classés Monument historique en 1987.

Dolmen dit "la tombas de las fadas" à Mazeyrat d'Allier (43).

Dolmen dit "las Tombas de las fadas" (la Tombe des fées) près de Mazeyrat d'Allier (43).

Dolmen dit "las Tombas de las fadas" (la Tombe des fées) près de Mazeyrat d'Allier (43).

Les paysans de cette contrée racontent que sept fées très petites et blondes, pâles et couvertes d'un voile, se retrouvaient jadis sur ce site pour filer leur laine blanche et noire. Lors de leurs veillées elles apportaient de lourdes pierres qui leur servaient ensuite de sièges. Mais une nuit, pour une raison demeurée mystérieuse, les énormes blocs écrasèrent les fileuses et devinrent leur sépulture. Le Dolmen dit "Las Tombas de la fadas" (la Tombe des fées) au hameau de Rougeac près de Mazeyrat-d'Allier, a été classé Monument historique en 1862.

Dolmen de Saint-Marceau à Langeac (43)

Dolmen de la Croix de Saint-Marceau, à Langeac (43)

Dolmen de la Croix de Saint-Marceau, à Langeac (43)

La légende raconte que la femme d'un grand chef Arvernes (l'un des principaux peuples de la Gaule avant la conquête romaine) aurait été tuée lors d'une attaque. Malgré tout, après une terrible bataille, le chef mena ses guerriers à la victoire. Mais ne pouvant vivre sans son amour, il alla se noyer dans un lac. Les villageois creusèrent la roche pour en faire deux tombeaux afin qu'ils reposent éternellement l'un à côté de l'autre... Il s'agit d'une tombe double, non datée, mais sans doute du haut Moyen-âge, classé Monument historique en 1862.

Dolmen dit "La Thuile des fées" près de Tailhac (43).

Dolmen dit "La Thuile des fées" près de Tailhac (43).

Sorcières, dames blanches, fées, druidesses... sont souvent présentes dans les légendes inspirées des mégalithes.

Sorcières, dames blanches, fées, druidesses... sont souvent présentes dans les légendes inspirées des mégalithes.

Menhir dit la Roche Seule, à Lavaudieu (43).

Menhir dit la Roche Seule, à Lavaudieu (43).

La Pierre de Saint-Martin à Saint-martin-en-Haut (69).

La Pierre de Saint-Martin à Saint-martin-en-Haut (69).

La Roche Matiole, à Maintigneux (69).

La Roche Matiole, à Maintigneux (69).

La Roche Samson, à Duerne (69).

La Roche Samson, à Duerne (69).

Qui, de Gargantua ou Satan, Saint Martin a-t-il vaincu à Vauxrenard ?

La Pierre de Saint-Martin à Vauxrenard (69)

Une tradition prétend que Satan, habitué des vilains tours joués à Martin, s'occupait de transporter des pierres au sommet du mont des Eguillettes. Le Saint l'aurait raillé sur son travail, bien indigne d'un si puissant personnage. Vexé, Satan jure alors de couronner son œuvre par le transport d'un rocher pris au fond de la vallée. Martin accueille cette annonce goguenard, tant elle ressemble à une vantardise. Mais voyant le diable approcher du but, le bloc chargé sur les épaules, voilà le Saint qui craint de voir Satan tenir sa promesse et le ridiculiser : il appelle alors le ciel à son secours, qui ne peut permettre qu'un des siens soit battu par l'ange des ténèbres. Satan fait donc un faux pas et laisse tomber la roche avant le sommet de la montagne. Le diable est aussi condamné à monter avec le gros orteil une série de marches microscopiques, taillées par saint Martin, dans la pierre qui porte son nom. Furieux de cette pénitence puérile le diable s'en venge en faisant exécuter par ses subordonnés, lors des nuits obscures, des rondes infernales autour de la pierre, désormais hantée.

La lutte entre Satan et Saint-Martin est une source d'inspiration récurrente pour la tradition.

La lutte entre Satan et Saint-Martin est une source d'inspiration récurrente pour la tradition.

Mais l'adversaire vaincu à Vauxrenard, pourrait aussi bien être Gargantua, connu pour semer des roches un peu partout.
Le géant (représentant le paganisme du monde antique finissant), provoqué par Saint Martin (héros de la Chrétienté naissante) aurait voulu installer cet énorme rocher, pris bien plus bas dans le lit de la rivière «Mauvaise», au sommet de la montagne des Aiguillettes, en signe de défi lancé au divin. Il allait réussir si Saint Martin invoquant anges et archanges n’était parvenu à l’en empêcher. Sur la pierre, recouverte d’une mousse épaisse, se devine une marque qui serait celle du cheval monté par Saint Martin. La légende raconte qu'après avoir arrêté le transport sacrilège de la pierre, le Saint s’est élevé chevauchant son destrier de centurion romain, vers les cieux à une vitesse fabuleuse. Gargantua toujours selon les légendes locales aurait sa tombe (des rochers plantés sur une faille géologique) non loin de là : en se désaltérant de l’eau de la Saône, qui était à l’époque d’une grande pureté, le malheureux géant serait mort d’avoir avalé une barque chargée de poudre.

Des pierres de Justice pour confondre les menteurs ou pierre de sacrifices druidiques ?

Autel de la Baronnie à Cervières et Noirétable (42)

La Pierre de la Baronnie était-elle une pierre d'épreuve ou de Justice ? Ces mégalithes sur lesquels les présumés coupables d’un crime ou d’un délit étaient assis pour être interrogés... La roche devait alors ressentir le mensonge grâce au pouvoir du magnétisme et se mettre à vibrer. Il est parfois difficile de faire la part entre ce qui est dû à la nature et ce qui est dû à l'Homme. Les blocs atypiques du canton de Noirétable, solitaires ou entassés, parfois en équilibre ou aux formes suggestives, ne sont peut-être bien que le produit de l'érosion en terrain granitique... mais ils se sont vus attribuer au cours des siècles, par les hommes, un rôle religieux. Il y eut ainsi des érudits pour voir là un lieu de culte celtique, une pierre de sacrifice utilisée par l'un des savants du « collège de druides » de la région de Noirétable et de Cervières.

Toutes les cuvettes sur les pierres avoisinantes, la Pierre branlante, la Pierre du siège... auraient ainsi servi aux rituels, et les tranchées pour l’écoulement du sang. Le bassin de l’une de ces pierres est assez grand pour accueillir le corps d’un humain allongé, tandis que la roche formant un siège, aurait pu aider les femmes à accoucher... Les cupules, remplies d'eau puisée à la source sacrée, dans l'enceinte de la forêt, auraient encore permis la macération de la verveine et du gui...

Autel de la Baronnie, près de Noirétable.

Autel de la Baronnie, près de Noirétable.

Les druides celtiques organisaient des rituels et des sacrifices sur certaines de ces pierres.

Les druides celtiques organisaient des rituels et des sacrifices sur certaines de ces pierres.

La Pierre qui chante, parmi les Rochers de Marlin, dans le Pilat.

La Pierre qui chante, parmi les Rochers de Marlin, dans le Pilat.

La pierre du Dauphin, à proximité.

La pierre du Dauphin, à proximité.

Pierre enchanteresse ou diabolique ?
Merlin ou le Diable ?

Les rochers de Marlin à Sainte-Croix-en-Jarez (42)

Une légende dit qu'un jour le diable partit du Dauphiné portant une lourde pierre sur son dos. Fatigué, il la posa sur la lande près de La Chapelle de Jurieux sur le site des "Roches du Marlin" (Marlin voulant dire soit Malin : le diable, soit  Merlin l'enchanteur). La tradition prête d'étranges pouvoirs à cette grosse pierre oblongue de 4 mètres de long posée en équilibre sur l’affleurement rocheux de la crête de Marlin : quiconque s'endort dessus se réveille soit avec la connaissance universelle, soit en ayant définitivement perdu la raison. Cette "Pierre qui chante" (en référence à l'"enchantement") évoque aussi Merlin, qui a peut-être donné son nom à l'amoncellement de roches alentours. A moins que ce ne soit, à sa surface, le dessin d'un visage qui chante, formé par trois bassins ronds... Dans ce décor mégalithique, les légendes prétendent aussi qu'avait lieu une fois par an le grand rassemblement des druides. Ou encore qu'un chevalier osa voler la perle magique qu'un terrible dragon avait déposée là... Moins épique : des moines fantômes y viendraient en procession lors de l'équinoxe d'automne. On dit encore que du temps des celtes,  la surface de cette pierre était un lieu sacrificiel et qu'à la Saint Roch la Pierre du diable lançait un écho repris par toutes les pierres de la région du Pilat...

Le géant amoureux et la jeune bergère

La Pierre qui vire de Poligny (39)

Selon la légende, il y a fort longtemps, un géant un peu coquin se serait épris d'une bergère de Plasne. Un soir, il la poursuivit sur une côte appelée depuis la côte Saint­-Savin. Elle réussit à s'enfuir en appelant l'aide divine, et lorsque le géant allait l'atteindre, il fut mystérieusement immobilisé et transformé en rocher. Les dieux lui accordèrent cependant le droit de se retourner une fois tous les cent ans, ce qui expliquerait le nom de "Pierre qui vire". Une autre interprétation prétend que cette pierre aurait été le lieu de rites celtiques aux temps druidiques. Deux autres histoires sont venues enrichir ces légendes au cours des siècles. La première désigne Gargantua lui-même, coutumier du fait, comme ayant posé la pierre lors de son passage dans la région. Quant à la seconde, elle raconte que, rentrant de la campagne d'Italie, Bonaparte aurait fait halte sur ce rocher qui prit le nom de "Fauteuil de Napoléon" ou "de Balthazar".

La Pierre qui vire de Poligny.

La Pierre qui vire de Poligny.

Mégalithe de la Pierre Enon, à Vogna (hameau d'Arinthod).

Mégalithe de la Pierre Enon, à Vogna (hameau d'Arinthod).

Druidesses en rituel, fées joyeuses, dames blanches, sorcières...

La Pierre Enon à Vogna (39)

La tradition rapporte que ce monument était desservi par un collège de druidesses. Le pâtre du vallon de Vogna, voit encore au clair de lune, des dames blanches voltiger autour de la pierre énon, comme des crions (farfadets) de Bretagne folâtrent parmi les pierres de Carnac”, peut-on lire dans des textes anciens. La pierre Enon se situe dans le cirque rocheux de Vogna (hameau d’Arinthod), proche d’une falaise haute de 150 mètres. La pierre est en fait un bloc erratique d’environ 12 mètres de haut qui s’en est détaché et a parcouru une centaine de mètres lors de la fonte des glaciers, il y a 20 000 ans, pour s’enfoncer en partie à cet endroit. Elle a été longtemps considérée comme un dolmen, mais les fouilles n’ont jamais rien révélé. D’autres légendes racontent que des fées, joyeuses et parfois moqueuses, mais insaisissables, dansaient autour de cette pierre et se cachaient des visiteurs impromptus, devenant invisibles en un battement d’oeil. Ou encore que c’est le rendez-vous des sorcières pour leurs sabbats et que les paysans de la région y ont vu une dame blanche...

Le Jura, terre de commères !

Le Rocher des Commères à Sirod (39) et celui des Trois commères à Morbier (39)

Le Rocher des Commères à Sirod.

Le Rocher des Commères à Sirod.

Le seigneur de Château-Villain avait trois filles en âge de se marier : Berthe, Loïse et Hermance. Selon la coutume, le père invitait chaque dimanche un jeune homme du voisinage, en leur demandant de faire un choix. Mais les demoiselles trouvaient tous les prétendants qu'on leur présentait indignes d’elles... Le Châtelain s’en plaignit à la fée Mélusine, qui avait compris depuis longtemps que les jeunes filles avaient le cœur aussi dur et froid que le marbre. Pour punir les médisantes et exigeantes commères, en un coup de baguette magique, elle les figea en trois statues de pierre et les fit taire à jamais... deux des colonnes ont déjà été abattues par l'érosion.
Une histoire semblable accompagne le Rocher des Trois commères à Morbier. Et encore un troisième dans le Doubs, du côté de Pontarlier...

Le Rocher des Trois commères à Morbier.

Le Rocher des Trois commères à Morbier.

Samson et Gargantua se lancent des pierres

Le Bloc erratique de Riant-Mont à Vesancy et la Pierre brune de Rancé (01)

Le bloc erratique de Riant-Mont, à Vesancy, classé en 1909.

Le bloc erratique de Riant-Mont, à Vesancy, classé en 1909.

Les géants Samson, posté sur le Riaumont, et Gargantua, sur le mont Mussy de Divonne à 2,5 kilomètres de là, auraient été vus jouant aux palets et aux boules, se lançant réciproquement des blocs. Ce qui expliquerait la présence du bloc de Riant-Mont sur la commune de Vesancy... et les deux excavations que que l'on considère comme la marque du pied et de la main de Samson. Plus vraisemblablement cette roche (classée depuis 1909) est arrivée dans le pays de Gex, arrachée au Valais suisse lors des dernières glaciations puis transportée là par le glacier du Rhône qui allait alors jusqu’à Lyon et occupait les Dombes. La Pierre Brune de Rancé, près de Trévoux, aurait connu le même destin.

Bloc erratique de la Pierre brune, à Rancé près de Trévoux.

Bloc erratique de la Pierre brune, à Rancé près de Trévoux.

Le Menhir de Pierre-Fiche, à Simandre-sur-Suran, classé Monument historique en 1888.

Le Menhir de Pierre-Fiche, à Simandre-sur-Suran, classé Monument historique en 1888.

Quenouilles de fées et rituels de fécondité

Le Menhir de Pierre-Fiche à Simandre-sur-Suran (01)

A Simandre, on raconte que des fées de passage auraient planté dans un champ trois quenouilles (petit bâton garni de laine que les femmes filaient avec un fuseau ou un rouet) qui se seraient transformées en énormes pierres… Le menhir de Pierre-Fiche est aussi devenu un lieu de croyance populaire liée à la fécondité : les époux désireux d'avoir un enfant venaient se frictionner sur la pierre et des pèlerins la creusaient pour en avaler la poussière. Plus ancien monument classé au titre de monuments historiques dans le département (6 mars 1888), le mégalithe, dressé en bordure d’un champ de maïs, est une propriété privée mais reste visible depuis un sentier de randonnée. Il s'agit du seul menhir connu et un des rares monuments mégalithiques attestés de l'Ain. Il pourrait dater du néolithique moyen et des mentions anciennes évoquent deux autres menhirs qui auraient été arrachés au XVIIIe siècle. Il faisait donc peut-être partie d’un alignement ou d’un ensemble plus complexe.