Élections municipales

C’est leur dernière semaine en tant qu’élus

Ce dimanche 15 mars, les élections municipales auront un goût particulier pour eux puisqu’ils ont décidé, après plusieurs mandats, de ne pas se représenter.

Nous sommes allés à la rencontre de six maires quelques jours avant qu’ils ne rendent définitivement leur écharpe.

Ils nous ont confié leurs meilleurs souvenirs, les mauvais moments et… leurs projets.

Belleville-en-Beaujolais : Un « exercice passionnant » pour Bernard Fialaire

Bernard Fialaire veut nous faire une confidence. Son dernier match de rugby a été plus difficile à appréhender que le jour où il raccrochera l’écharpe de maire de Belleville. Même après quatre mandats successifs.

Sans doute car les choses vont se faire progressivement. « Je vais rester maire jusqu’à ce que le prochain soit élu et on ne sait pas exactement quand ce sera », précise-t-il. En effet, les citoyens éliront le conseil municipal en un ou deux tours ; puis les élus choisiront le maire, probablement la semaine suivante.

« S’obliger à laisser la place »

« Je resterai avec le nouveau maire pendant quelque temps pour passer le relais ; quel qu’il soit », ajoute Bernard Fialaire, par ailleurs médecin généraliste.

Il ne veut pas reproduire l’expérience qu’il a vécue en 1995 lorsqu’il a pris les rênes de l’hôtel de ville : « Il n’y avait personne pour m’accueillir, se souvient-il. Nous avons ouvert les placards un par un… »

Au-delà des délibérations qui ont été prises, « il faudra transmettre l’avancée des projets, l’état de négociations informelles, etc. ». En tout cas, ce sera sans regret : « Je ne fais pas partie des élus qui disent qu’être maire, c’est trop difficile. J’ai trouvé ça passionnant ; mais il faut s’obliger à laisser la place. »

« Redonner une place aux élus dans la République »

D’autant qu’il a un objectif en vue : un siège de sénateur du Rhône. Bernard Fialaire ne s’en est jamais caché : « J’étais déjà candidat lors du dernier renouvellement », rappelle-t-il, avant d’ajouter : « Quand on a été maire pendant vingt-cinq ans, président d’une communauté de communes, artisan d’une commune nouvelle (1), conseiller départemental, cela donne un acquis intéressant pour bien représenter les élus, à un moment où il y a une place à leur redonner dans la République. »

La campagne commencera en avril et l’élection aura lieu en septembre, lorsqu’il fêtera ses 63 printemps. Élu ou pas au Sénat, il ne prévoit pas de prendre sa retraite dans l’immédiat. Le médecin généraliste entend poursuivre ses consultations.

L. S.

1- Belleville-en-Beaujolais est née de la fusion de Belleville et Saint-Jean-d’Ardières le 1er janvier 2019. Bernard Fialaire, après avoir été maire de la commune nouvelle, est désormais maire délégué de Belleville. Serges Fessy, ex-maire délégué de Saint-Jean, est maire de Belleville-en-Beaujolais depuis le 2 septembre 2019.

Lyon : « Une autre génération doit prendre les rênes » selon Christian Coulon

Après vingt-cinq ans d’une vie politique consacrée à son 8e arrondissement de Lyon, Christian Coulon s’apprête à décrocher le portrait de François Mitterrand, son « maître à penser », qui trône dans le bureau depuis son installation derrière le bureau de l’édile, en 2001.

« On pense qu’on va régler tous les problèmes »

« Les nuits étaient très courtes », se souvient l’ancien dessinateur industriel, « le dernier métallo de l’exécutif de la ville de Lyon », qui ne peut se consacrer pleinement à la mairie que depuis sa retraite professionnelle, il y a dix ans, et qui a découvert petit à petit la fonction, et ses limites. « Quand on est élu, on pense qu’on va régler tous les problèmes. Cela m’avait au départ beaucoup contrarié. »

Sa famille socialiste, il lui voue une fidélité sans faille. Ce qui lui fait regretter de la voir éclater au moment de tirer un trait sur la politique.

« Aujourd’hui, je retrouve la majorité sortante sur quatre listes différentes, ce n’est pas ce que j’avais espéré. Je pensais qu’il aurait pu y avoir une homogénéité bien plus importante. Je ne veux pas trop juger, je tourne une page je vais essayer de ne pas trop la déchirer ni l’écorner. »

Un petit coup de blues

S’il concède qu’il aura certainement « un petit coup de blues », Christian Coulon s’apprête à passer sereinement la main, après trois mandats à la tête de la mairie du 8e arrondissement. « Je ne serai pas loin si on m’appelle, mais ce ne serait pas souhaitable pour celui ou celle qui me remplacera. C’est une autre génération qui doit prendre les rênes. »

Une génération moins focalisée sur le transport individuel qu’ont pu l’être « les soixante-huitards dont l’objectif premier était de se payer une voiture », même si une des plus grandes fiertés de son action reste « l’implantation des deux lignes de tramway dans le 8e ».

Les bons moments n’effacent pas les tragiques événements

Trois mandats placés également sous le signe de la recherche et de la sphère médicale. Un développement qui a permis à Christian Coulon de rencontrer des personnalités qu’il n’aurait jamais croisées, à l’image d’un déjeuner mémorable en compagnie du cancérologue Léon Schwarzenberg et du journaliste Jean Lacouture, qu’il se remémore encore avec émotion. « Nous étions pratiquement en tête-à-tête, c’était un grand moment. »

De belles rencontres, mais également de tragiques événements : l’incendie meurtrier de la route de Vienne l’an dernier, qu’il « ne risque pas d’oublier » ; la fusillade en 2009 qui a coûté la vie au jeune Amar, 12 ans ; ou le décès de Tina et Raouf, en 2007, morts dans un accident après le vol d’un véhicule.

« Ce sont des moments pas faciles à assumer en tant que maire. Les joutes politiques ne sont pas très importantes par rapport à ce genre d’événement. »

Clémence OUTTERYCK

perandi Villeurbanne : Les dernières notes du chef d’orchestre

Jean-Paul Bret, 73 ans, n’est pas candidat au renouvellement de son mandat de maire, qu’il exerce depuis 2001. Depuis trois semaines, il fait ses cartons, entre deux impératifs municipaux.

« Je n’avais pas vraiment répété. Ce n’était pas trop mal », sourit Jean-Paul Bret, le maire socialiste de Villeurbanne.

À quelques jours de rendre son écharpe, il a poussé la chansonnette ce jeudi 5 mars devant plus de 230 têtes blanches, pour le traditionnel moment musical autour de l’orgue de l’hôtel de ville. Même rappelé par le public pour entonner à nouveau Armstrong de Claude Nougaro. « L’an dernier, j’avais fait Gabrielle de Johnny. J’ai deux ou trois pièces à mon répertoire », s’amuse-t-il.

La pause musicale s’inscrit au milieu d’un agenda encore bien rempli : inauguration d’un complexe sportif, pose d’une première pierre, conseil d’administration, etc.

« Pas envie d’être dans un bureau vide »

Ce dimanche 15 mars, « je n’échapperai pas à l’impatience de connaître les résultats ». Au préalable, l’édile aura fait « le tour des bureaux de vote, comme à chaque fois depuis que je suis maire. Il y en a quand même 79. »

L’élu peut prendre son temps. Il a de l’avance dans les cartons. « J’ai commencé il y a trois semaines à ranger mes affaires. »

Ses documents seront probablement les premiers à être numérisés par les archives municipales. « Je suis un bon contributeur. » Quarante-trois ans de vie politique locale, tout de même. « Je suis content de donner cela à la postérité. Je retombe sur des choses que j’avais un peu oubliées. Je vais emmener des archives provisoirement chez moi, que j’ai envie de regarder à nouveau. »

« Je trouverai facilement à m’occuper »

Devant lui, « deux marionnettes offertes par des Coréens du Sud venus pour les Invites. Je ne suis pas très collectionneur d’objets mais je vais les garder ». Comme ce portrait de Léon Blum, « imprimé sur un truc simple », qu’a offert un brocanteur à son prédécesseur Charles Hernu, « qui me l’a donné ».

« Je n’ai pas de programme pour après. Je pensais aller à Venise en couple et avec des amis. Mais on a annulé » avec l’épidémie de Covid-19. Il faudra aussi s’occuper de cet implant dentaire, remis à plus tard. « Je pense que je trouverai facilement à m’occuper. » À Villeurbanne, essentiellement.

Jérôme MORIN

Ouest rhodanien : Michel Mercier compte bien « travailler jusqu’à la dernière minute »

Il était élu depuis 1971, sans interruption. Prendre des décisions, enchaîner les déplacements professionnels, participer à d’innombrables réunions : Michel Mercier a vécu à ce rythme pendant pratiquement un demi-siècle.

Successivement conseiller municipal de Thizy puis maire, sénateur, député, président du conseil général du Rhône et même ministre pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, l’actuel patron de la communauté d’agglomération de l’Ouest rhodanien (COR) tournera la page de sa vie politique après ces élections municipales des dimanches 15 et 22 mars.

« J’y suis prêt depuis plus de quarante-cinq ans. Je suis un vrai républicain et je savais que ça s’arrêterait. Un jour, c’est plus nous », confie-t-il, « sans regret », alors qu’il n’est pas candidat aux Municipales à Thizy les Bourgs.

Je savais que ça s’arrêterait mais je veux faire avancer les dossiers jusqu’au bout.
Michel Mercier

Pour ses derniers jours à la tête de la communauté d’agglomération, Michel Mercier compte « travailler jusqu’à la dernière minute ». « Je veux faire avancer les dossiers jusqu’au bout. Après, mon successeur les orientera comme il veut », indique-t-il.

De nombreux rendez-vous étaient encore inscrits à son agenda lors de la semaine écoulée. « J’ai poursuivi les discussions avec les entreprises qui veulent s’implanter sur nos zones d’activités économiques. J’ai aussi travaillé sur un dossier d’habitat insalubre », détaille-t-il.

Le conseil d’installation reste à préparer

Au lendemain du premier tour des Municipales, la situation évoluera : « Ce sera surtout de la gestion des affaires courantes et je préparerai le conseil d’installation de la nouvelle équipe. » Un rendez-vous qui sera le tout dernier de sa carrière politique. Après le second tour de ces élections municipales, Michel Mercier aura jusqu’au 24 avril pour le convoquer. « Ca ira très vite », assure-t-il.

Dans la foulée, il poursuivra sa vie chez lui, à Thizy les Bourgs. « Je n’ai pas d’autre envie que de vivre mon temps parmi vous, discrètement », écrivait-il dans le courrier distribué aux habitants de sa commune pour officialiser la fin de sa carrière politique. Un futur quotidien qui approche à grand pas, où il prévoit de lire et de s’occuper de ses petits-enfants, tout en gardant « un œil attentif sur les futures décisions des élus ».

Avec une nuance de taille : « Mais comme un citoyen lambda, un simple habitant du territoire. »

Yoann TERRASSE

Brignais : Paul Minssieux « passe la main avec sérénité »

Paul Minssieux est entré dans la vie municipale de sa commune il y a trente-sept ans, d’abord adjoint à l’Économie et aux Affaires scolaires, puis en tant que maire depuis quatorze ans. C’est donc une page qui se tourne à Brignais en ce mois de mars puisqu’il termine son dernier mandat.

Difficile ? Non, surtout quand on s’y prépare depuis six ans : « J’ai pris ma décision lors de ma réélection en 2014, raconte-t-il. Dès la constitution de la liste, j’avais cette idée en tête de préparer ma succession et j’ai accompli ce mandat avec l’envie de transmettre aux suivants. »

D’où la volonté de rendre des dossiers bouclés, comme de prendre les derniers arbitrages sur les finances de la commune : « On a aussi soldé le sujet du PLU (Plan local d’urbanisme, Ndlr) pour ne pas laisser un dossier aussi lourd à une équipe, dont la moitié au moins n’aurait pas une connaissance approfondie de la question… »

Actualité chargée

Une dernière semaine encore studieuse donc, même si elle revêt aussi une couleur plus légère. « Une municipalité, c’est aussi de l’humain… J’ai tenu à aller saluer les gens, pour dire au revoir et leur rappeler que je ne les quitte pas, je vis toujours à Brignais ! »

Ce mardi 10 mars, Paul Minssieux était invité à un petit-déjeuner à l’école Jean-Moulin. « Et le même jour, je signais l’achat de l’ex maison du département pour en faire une maison médicale de garde. »

Et l’actualité chargée de ces jours maintient le maire sous pression jusqu’au bout : « On doit organiser les élections, c’est un gros travail pour permettre à tous de s’exprimer. Et un travail compliqué par le phénomène coronavirus, qui inquiète. »

Malgré tout, Paul Minssieux assure passer la main avec sérénité. « Être maire est très enrichissant, cela demande un engagement complet, et s’en libérer, c’est bien aussi. Je suis sans regret car on a fait au mieux. Il y a des moments très difficiles, notamment quand on doit accompagner les gens dans la difficulté et surtout quand il faut annoncer de mauvaises nouvelles aux familles. Mais dans ces moments-là, comme on a pu en connaître pendant les inondations, j’ai vu une solidarité, une mobilisation et des gestes solidaires qui m’ont apporté une grande satisfaction. »

Frédéric GUILLON