L'ASSE et la Coupe de France: l'autre épopée

En Coupe de France, la dernière finale (perdue) de l'ASSE remonte à 1982, face... au PSG. Mais avant cette date, les Verts accédaient très régulièrement au dernier match de cette compétition créée en 1917. En vingt ans, les joueurs ligériens ont joué neuf finales et remporté six titres. Seuls le PSG et l'OM ont fait mieux.
Revivez les finales des Verts en Coupe de France de 1960 à 1982.

15 mai 1960

Monaco-ASSE (4-2)

À deux minutes près
88e. Biancheri le Monégasque se concentre pour tirer son coup-franc. Les Stéphanois essaient de garder leur sang-froid. Car le match a connu un tournant, décisif peut-être, trois minutes plus tôt. Une grosse clameur, celle des supporters stéphanois, avait résonné à ce moment-là. René Domingo, le capitaine, venait de marquer. Les Verts mènent alors 2-1, et ce n’est que justice, à cinq minutes de la fin. Il faut tenir…

J-4

René Vernier a emmené son effectif du côté de Saint-Genest-Malifaux pour la mise au vert. À quatre jours de la finale, il a un problème… deux problèmes. Cassado (adducteurs) et Coinçon (claquage à la cuisse) sont incertains. Et il s’agit de deux titulaires précieux. Pourront-ils jouer ? «C’est le médecin qui décidera.»

Du côté de Monaco, Lucien Leduc a décidé de remplacer la mise au vert par des courts déplacements hors la Principauté. Le but : éloigner ses joueurs des tentations de la ville… C’est ainsi qu’ils iront courir autour d’Eze, sur le sable de la plage, ou jouer avec un ballon de rugby au golf du Mont Agel. Un seul entraînement est prévu : le jeudi, avant-veille du match.

J-3

La nouvelle est tombée : Cassado ne jouera pas. Vraiment un coup dur. Le défenseur droit est expérimenté, fiable, solide. L’idéal pour une finale. Richard Tylinski le remplacera à un poste nouveau pour lui.

J-2

Les joueurs se sont entraînés une dernière fois au stade Geoffroy-Guichard : séance de culture physique et petit match réalisé avec une seule consigne : jouer vite ! Tout le monde semble en forme. Tous sauf un… Coinçon grimace en sortant des vestiaires : la cuisse est douloureuse.

À Monaco, c’est de bonne guerre dans les médias, on se méfie des Stéphanois : «On aurait grand tort de croire que parce que nous avons éliminé Nice en quarts de finale et Reims en demi-finales, c’est-à-dire deux des favoris, la tâche sera facile pour nous. Au contraire, nous craignons tous l’équipe stéphanoise qui est sans doute plus forte qu’on ne le croit généralement.»

C’est vrai, si l’ASSE est devenue championne de France en 1957 et qu’une partie de l’effectif est toujours là, elle est depuis rentrée dans le rang, notamment à cause du départ de deux hommes clés : l’entraîneur Jean Snella et l’attaquant vedette Rachid Mekloufi. Depuis, le club a reculé et ne joue plus les premiers rôles. Pire, il a peut-être aussi perdu son âme de club formateur.

J-1

Les joueurs sont partis de Châteaucreux par le train de 12h37. Ils ont le sourire aux lèvres. Surtout un : Balboa, même pas 20 ans, encore amateur, et qui jouera peut-être en fonction de l’indisponibilité de Coinçon. Robert Herbin, depuis le service militaire, les rejoints directement à Chantilly où ils logent. L’entraîneur Vernier se veut rassurant : « Tout va bien. Nous avons un peu souffert de la chaleur. Ici le temps est très beau mais la forêt est toute proche. Nous aurons là tout l’ombrage nécessaire. Mes joueurs ont un appétit d’ogre ! »

Jour J

Jour de finale ! Rencontre inédite car les deux équipes jouent pour la première fois ce match capital. Le duel se joue au stade Yves-du-Manoir, vieille enceinte démodée et défraichie qui offre presque un cadre anachronique. C’est une opposition de styles sur la pelouse. Les Stéphanois, plus jeunes, ont un jeu plus chatoyant et rapide, quoiqu’irréguliers. Les Monégasque, de leur côté, apparaissent plus expérimentés et solides. Leur club a développé de gros moyens depuis quelques années. Il faut maintenant gagner ! D’autant plus que le prince Rainier et la belle princesse Grace assistent au match.

Biancheri a tiré son coup-franc et vient de marquer. Monaco égalise 2-2 à deux minutes de la fin. Quel dommage! Les Stéphanois avaient dominé le temps réglementaire. Malgré le but encaissé à la 5e, ils ont fait le jeu et Liron, outre son égalisation à la 43e, a eu trois occasions énormes : une bousculade limite, l’intérieur du poteau et le gardien l’en ont empêché. Balboa s’est fait adopter par le public parisien pour son quatrième match seulement avec les pros. Peut-être un futur crack celui-là… Dominateur pendant les 90 premières minutes, les Foréziens n’ont plus d’essence ensuite. Ils prennent deux buts pendant la prolongation. Ils perdent là leur première finale de Coupe de France. L’entraîneur monégasque a résumé la leçon : « Saint-Etienne est passé près de la victoire et nous près de la défaite mais la Coupe, c’est aussi une affaire de condition physique ».

13 mai 1962

ASSE-Nancy (1-0)

Comme pour oublier…
Peut-on vivre saison plus paradoxale ? L’ASSE, malgré un effectif de qualité, a raté sa saison. Pour la première fois de son histoire, l’équipe est rétrogradée en deuxième division. Une catastrophe pour un club champion cinq ans plus tôt. Une éclaircie embellit néanmoins le paysage : la finale de la Coupe de France contre Nancy. Après celle perdue contre Monaco deux ans auparavant, il s’agit cette fois de ne pas se louper.

J-5

Une finale, ça motive un groupe et tous les joueurs se disent aptes. Même Rijveers, touché à une cuisse. Un enthousiasme peu vu cette saison pourtant. L’entraîneur François Wicart a donc le choix. En face, Zatelli a rendu sa composition d’équipe publique. Il aligne notamment un joueur amateur, Chrétien, en attaque.

J-4

Rijveers a rechuté. Forfait… Oleksiak le remplacera. À noter que Cassado joue arrière droit, deux ans après avoir manqué la finale perdue contre Monaco. Le président Rocher s’est adressé à ses joueurs : «Je voudrais retrouver le grand Saint-Étienne, l’équipe qui enchantait les foules sportives voici peu de temps encore. Le public forézien compte sur vous. Vous lui devez bien cette victoire à titre de revanche pour vous faire pardonner vos échecs du championnat. Moi aussi, je compte sur vous ».

J-3

Dernier entraînement avant le départ : opposition sur la moitié d’un terrain pendant la matinée. Après le déjeuner, les joueurs s’occupent des enfants de l’école de football. Et oui, en 1962, les professionnels font aussi moniteurs auprès des jeunes du club ! Tous les billets mis à disposition au club stéphanois sont vendus : 1 000 supporters seront à Colombes.

Le lendemain, vendredi, le départ est prévu à 7h42 à Châteaucreux. Les journaux l’ont annoncé : la finale de la Coupe de France sera diffusée à la télévision française.

J-1

L’heure des analyses et des prévisions. L’ASSE semble favorite. Certes, les Stéphanois sont rétrogradés en deuxième division mais ils ont des joueurs de qualité, assez pour jouer les premières places. Ce n’est pas arrivé malheureusement. Ils ont éliminé successivement Le Mans, Toulouse, Lens, Béziers et Angers. Sept joueurs ont perdu contre Monaco en 1960 : une finale, ils connaissent et n’ont pas envie de connaitre la même désillusion. Nancy, de son côté, est une équipe très régulière et peu spectaculaire. Elle marque peu et s’est toujours qualifiée avec un seul but d’écart. Les Lorrains ont déjà joué, et perdu, une finale. C’était contre Lille (1-2) en 1953. Collot, le capitaine, est le seul rescapé et entend bien prendre sa revanche.

En championnat, avantage Nancy, vainqueur du match retour (2-1) après un nul (1-1) à l’aller. Les entraîneurs, de leur côté, finissent de motiver leur équipe avec des discours différents. La confiance pour Wicart : «J’ai l’impression que les joueurs stéphanois ont compris que cette finale constituait pour eux la dernière possibilité de maintenir leur standing personnel. Je suis persuadé qu’ils vont saisir cette ultime occasion.»

« L’équipe de Saint-Étienne a plus de raisons que vous de vouloir un succès. De plus, j’estime que sur le papier, elle est supérieure à la nôtre. Ceci ne doit pas vous vexer, c’est la vérité. Mais cela doit vous inciter à être appliqués ».
Zatelli à l’adresse de ses gars 

Jour J

Cela n’a sans doute pas été une grande finale. Il manquait pour cela deux grandes équipes et non un protagoniste prêt à jouer à l’étage inférieur. Des maladresses, des erreurs d’appréciation… Le match a pourtant été assez rythmé avec globalement une domination stéphanoise et des contre-attaques nancéiennes encore plus dangereuses, notamment en première période.

Et c’est quand les Verts commencent de baisser de rythme, à quatre minutes de la fin, qu’ils l’emportent. Adamzyck perd la balle face à Herbin qui donne rapidement à Baulu. Le ballon passe entre les jambes de Ferreiro. Les Lorrains hurlent ! Y-a-t-il faute sur Adamzyck ? Ils protestent : ils ont arrêté de jouer. Le but est validé. Baulu peut alors raconter le but victorieux. « Je venais de me faire tancer par Ferrier, alors je me suis élancé en avant, j’ai eu la balle, je voulais centrer mais j’ai vu Ferreiro sortir, alors j’ai tiré… en fermant les yeux. »

L’ASSE gagne sa première Coupe de France. Les joueurs stéphanois ne sont pas encore habitués, à l’image du capitaine Domingo.

« On m’avait dit que je tremblerai au moment de recevoir la Coupe des mains du président de la République. Je ne me croyais pas capable de trembler. Je n’ai pas tremblé à vrai dire mais je ne me sentais pas costaud, croyez-moi. C’est la plus belle victoire pour un footballeur ».

12 mai 1968

ASSE-Bordeaux (2-1)

L’adieu de Rachid
1968, cela fait déjà deux saisons que l’ASSE domine le championnat de France. Jean Snella, l’entraîneur de tous les succès a été remplacé par Albert Batteux sans que la courbe des résultats ne fléchisse. Encore mieux, déjà championne avant la fin de l’exercice, l’ASSE vise le doublé. Les événements de Mai 1968 commencent à mettre le pays sens dessus dessous alors que les Verts s’apprêtent le 12 mai à affronter les Girondins de Bordeaux. Un match historique dans un contexte qui ne l’est pas moins.

J-4

Le président Rocher prévoit 5 000 supporters stéphanois à Colombes dimanche. L’interview se passe au stade Geoffroy-Guichard et contrairement à l’équipe bien en place, l’enceinte est en chantier. Maçons, charpentiers, ouvriers construisent une nouvelle tribune Henri Point pouvant accueillir 7 000 spectateurs et un toit pour les deux tribunes derrière les buts.

Les joueurs, de leur côté, se sont entraînés pendant une heure trente alternant travail physique et jeu avec ballon. L’arrière droit Durkovic est absent mais le docteur Poty est optimiste quant à sa participation à la finale. Tant mieux. Bereta, de son côté, devrait être titulaire à la place de Keita. Ce dernier devrait être remplaçant. En effet, pour la première fois de l’histoire, les remplacements seront autorisés.

J-3

La finale du dimanche sera la 51e de l’histoire. Pour l’ASSE, c’est sa troisième, une perdue, une gagnée. Bordeaux jouera le trophée pour la sixième fois avec une seule victoire, il y a longtemps, en 1941. Plus qu’une finale, c’est la conception de deux football des années 1960 qui s’affrontent : le jeu offensif et le béton.

Saint-Étienne, on le sait, et d’autant plus sous la direction de Batteux, propose un football varié, offensif, spectaculaire, composé de petites passes. Il faut dire que l’entraîneur a ce qu’il faut dans l’effectif.

À Bordeaux, c’est l’inverse. L’entraîneur René Bakrim fait comme il peut et perpétue la tradition du jeu défensif et de contre-attaque qui caractérise les Girondins depuis des années.

C’est jeudi et Batteux a parlé longuement, comme d’habitude, devant ses joueurs afin d’annoncer la composition. Rien n’a encore filtré évidemment. Puis entraînement de mise au point porteur d’une bonne nouvelle : Durkovic a récupéré. Seul Larqué ne peut se préparer idéalement : il bosse pour son diplôme de professorat d’éducation physique. La confiance jaillit des propos du coach : « La sérénité de mes joueurs me rend confiance. Trois jours avant Colombes, j’ai déjà l’impression que tout ira bien. Qualités et défauts bordelais nous sont connus. Deux matchs terminés sur deux succès ont permis d’utiles enseignements ».

Pour l’ASSE, gagner une finale ne constitue plus un exploit. Le club est devenu adulte et terriblement dominateur.

J-2

La force stéphanoise réside dans ses buteurs. Hervé Revelli émerge à peine et est déjà redouté. Keita ne jouera pas, Batteux veut que Mekloufi finisse en beauté avant d’être remplacé par le Malien. Au pire, il rentrera si la défense bordelaise résiste aux assauts.

Herbin est le capitaine de l’équipe et joue devant : il a avancé au fil de sa carrière après avoir débuté arrière central. Expérimenté, il sait la force de son équipe. « Il faudrait des Bordelais sensationnels pour nous barrer la route. Avec les Girondins, on ne part pas dans l’inconnu. Malgré leur accord pour que la finale soit spectaculaire, ils se défonceront pour imposer leur méthode habituelle. La tâche est toute tracée. À nous de la mener à bon terme. Enfin, pour Mekloufi, tout le monde sent que la fin de l’aventure est proche… « Pour remporter la Coupe, je donnerai ma prime. C’est probablement la dernière fois que l’occasion me sera offerte de compléter mon palmarès. Je sais déjà que mes coéquipiers se surpasseront. Eux aussi peuvent compter sur moi ».

Jour J

Noyée dans les événements de Mai-68, le match est une grande finale. Pour les Stéphanois, la tâche s’avère plus difficile : les Bordelais ont marqué à la quatrième et le match a changé. Tout à coup, les Foréziens n’y arrivent plus.

Heureusement, Mekloufi est là. Car la défense girondine a bien serré les deux ailiers Bereta et Fefeu. Elle a seulement oublié Rachid… Le meneur stéphanois est partout, à la distribution et à la finition. Il égalise d’une reprise de volée encore célèbre aujourd’hui. L’heure suivante est plus conforme aux prévisions : l’ASSE attaque, Bordeaux défend jusqu’à la 77. Revelli se fait balancer par trois adversaires. Penalty.

Explication d’Herbin : « Il était décidé que c’était Revelli qui tirerait. Mais Hervé avait déjà pris pas mal de coups et avait beaucoup couru. Aussi, j’ai insisté pour que ce soit Rachid qui le remplace.» Et celui-ci tire donc le coup de pied et marque. Refusé : un Stéphanois est intervenu. A retirer. Mekloufi récidive, Montès touche mais le ballon fait mouche.

Les Verts ont gagné. Ils remportent pour la première fois de leur histoire le doublé Coupe-championnat. Et c’est tout sauf une surprise.

31 mai 1970

ASSE-Nantes (5-0)

Facile, trop facile…
L’ASSE a-t-elle déjà été dans son histoire aussi forte ? Probablement pas. Les Verts sont déjà champions, pour la quatrième saison d’affilée, avant même la finale de la Coupe de France. De plus, gagner une finale, les Verts savent le faire depuis 1962...

J-4

Les Verts l’emportent facilement sur le terrain de Valenciennes 3-0. Au petit trot, en jouant presque en marchant et juste avec quelques accélérations. Bref, une victoire propre. La question du jour porte sur le départ éventuel de Robert Herbin à Nice. Le capitaine des Verts ne nie pas. « Je n’ai encore rien décidé. Je vais sans doute discuter avec M. Rocher après la finale ». Ce dernier a fait ses comptes. Une victoire en Coupe de France coûtera au club 400 000 anciens francs par joueur. Quel que soit le résultat, les joueurs, leurs épouses et l’encadrement iront dîner à l’hôtel Hilton avant de passer la soirée et le début de la nuit au Lido.

J-3

C’est l’heure des analyses des observateurs. Pour l’ASSE, la situation ne peut être plus favorable. L’objectif de l’entraîneur Albert Batteux est atteint : être champion avant de jouer la Coupe. Nantes ne semble pas au meilleur de sa forme et viennent même d’encaisser quatre buts à Nîmes. Beaucoup de spécialistes considèrent que la finale regroupe les deux meilleures équipes françaises. D’autant que Nantes arrive régulièrement à poser des problèmes aux Stéphanois. Mais même…

Le collectif vert semble au point sans compter la perle noire, Salif Keita, qui peut gagner le match à lui seul. Celui-ci a d’ailleurs promis de « faire un malheur à Colombes » pour une épreuve qu’il n’a encore jamais gagnée, n’ayant pas joué la finale de 1968. Bref, difficile de trouver une issue incertaine… Qu’importe, Batteux conclut le débat en fin psychologue. « La Coupe, c’est une récompense. En ce qui nous concerne, nous préférons le championnat. Aussi, si nous perdons à Colombes, nous n’en ferons pas une maladie ».

J-2

Loin de la France, le Mundial mexicain ouvre aujourd’hui avec la rencontre Mexique-URSS. Personne ne sait qu’il s’agit du premier match d’un tournoi légendaire marqué par le « roi Pelé »…

À Nantes, José Arribas, quoiqu’il en pense, affirme ne pas jouer pour être ridicule. « Nous avons notre mot à dire devant les Stéphanois. Certes, ils partent logiquement favoris mais une finale de Coupe de France, c’est toute autre chose. 90 minutes de jeu et de suspense.»

Jusqu’au bout, il garde ses joueurs au vert dans la forêt de Montmorency et la lecture des journaux y est interdite ! Probablement pour préserver le moral des joueurs.

Jour J

Une rencontre a priori déjà jouée, voire déséquilibrée, voilà un scénario qui débouche parfois sur une surprise. Eh bien non.

Le plus surprenant est le parachutiste qui a amené le ballon de la rencontre en se posant pile au milieu du rond central. Pour le reste, cet ASSE-Nantes est du jamais vu. Une humiliation. Une leçon. La victoire la plus nette et large depuis la création de l’épreuve en 1918. Point de rebondissement mais du spectacle et une démonstration de football pour les spectateurs de Colombes. Les Stéphanois se sont adaptés à l’adversité. Keita par exemple. Surveillé de près par Estève et Lemerre, le soliste s’est mué en relayeur collectif et est à l’origine de quatre buts. C’est ainsi que les trois attaquants, Parizon, Revelli et Bereta, ont scoré. Sans compter Herbin, le capitaine. Nantes n’a été bon ni en défense, ni en attaque.

Les Canaris ont fait illusion pendant quinze minutes puis le jeu stéphanois s’est mis en place avec Jacquet et Herbin à la manœuvre jusqu’au but de Parizon, l’ailier droit, puis celui de Bereta son collègue de gauche.

2-0 à la mi-temps : personne ne doute de l’issue du match. La question se pose sur l’attitude stéphanoise : préserver le résultat ou continuer à enfoncer le clou ? Le troisième but amène la réponse. Au coup de sifflet final, évidemment, les attitudes sont contrastées. Lemerre est en colère. « C’est impensable, nous affrontions une équipe que nous savions déjà bien meilleure que la nôtre et nous l’avons laissée s’imposer en jouant tranquillement ». Son coéquipier Gondet, sans doute le meilleur Nantais, avoue son fatalisme. « Chez nous, ce fut le « off-day » total : cinq buts dans nos filets, aucun dans ceux de notre adversaire… rien n’a marché ».

Dans le vestiaire stéphanois, des dizaines de personnes entre joueurs, staff, journaliste ou même le maire Michel Durafour. Batteux analyse tranquillement le match.

« Nous avons eu de bout en bout la maitrise du jeu. Et après le deuxième but, totalement décontractés, nous avons continué sur notre lancée. Notre excellent jeu collectif a fait une large différence ». Le mot de la fin est pour Herbin qui, tout en se trompant sur la saison d’après, devine involontairement l’avenir européen du club pendant les années 1970… « Ce large succès sera un bon tremplin pour la coupe d’Europe. Je pense que sur le plan international, nous pourrons jouer un rôle intéressant ».

8 juin 1974

ASSE-Monaco (2-1)

Au métier
Quatre années ont passé depuis la finale remportée face à Nantes, et pour Saint-Étienne, l’époque a changé, les joueurs, l’entraîneur, le jeu aussi. La décennie 1970 s’annonce européenne mais ça, personne ne le sait encore. L’exploit contre Split aura lieu cinq mois plus tard. Ce qui n’a pas changé, en revanche, c’est la domination verte qui voit l’ASSE redevenir championne de France pour la première fois depuis… 1970. Et comme en 1970, rendez-vous est pris pour la finale de la Coupe de France.

J-3

C’est un souci étonnant que doit résoudre l’entraîneur Robert Herbin. Etonnant et épineux. Ivan Curkovic, le gardien yougoslave, a mal à un genou après un coup reçu en championnat. Le portier n’est en effet jamais blessé et est très important dans le jeu et le vestiaire. Roby ne se montre pas trop inquiet pourtant, Curko est un dur au mal et a même joué avec un doigt fracturé contre Rennes…

La rencontre va attirer les personnalités au Parc des Princes : le président de la République Valéry Giscard d’Estaing a annoncé sa présence tout comme le prince Rainier pour Monaco et Michel Durafour, maire de Saint-Etienne mais aussi ministre du Travail. 3 000 supporters stéphanois sont attendus à Paris.

J-2

Peu sont étonnés, mais Curkovic jouera bien. En revanche, c’est Hervé Revelli qui inquiète. Le docteur Poty, médecin du club, s’en fait écho. « Il joue actuellement avec des piqures pour atténuer la douleur mais ce n’est pas une solution ni même très indiqué sur le plan médical ». Son éventuelle absence est bien embêtante. C’est un chasseur de but hors-pair et sa présence seule intimide les défenses adverses. S’il est forfait, le jeune Christian Synaeghel le remplacera numériquement.

Une finale ne se prend pas à la légère, même quand elle oppose le champion  à un adversaire qui s’est sauvé de justesse en championnat. « On peut s’étonner que Monaco ait été longtemps menacé par la descente. Il faut croire que la faiblesse de l’équipe se situe en défense. Faudra-t-il être offensif ? » se demande Curkovic. En face, le buteur Onnis croit à ses chances. « Saint-Étienne n’a jamais réussi à nous donner la leçon en championnat. Je ne vois pas pourquoi pour ma part, je ne trouverai pas le chemin du but ». Les Verts se sont en effet imposés les deux fois au cours de la saison, 3-2 en étant mené 0-1. Herbin acquiesce à cette analyse pour mieux avertir, non pas ses joueurs mais peut-être bien le public… « Nous redoutons tout le monde et ne craignons personne. Cette saison, nous avons triomphé deux fois des Monégasques mais ce fut beaucoup plus difficile que d’aucuns le pensent. De toute évidence, cette équipe azuréenne vaut beaucoup plus que son classement ».

J-1

Le troisième doublé est peut-être pour le lendemain. Probablement. Les Verts sont favoris, et nettement. Mais ils joueront sans Hervé Revelli, c’est décidé et officiel.

Pour l’entraîneur, le buteur n’est pas en pleine possession de ses moyens et sera remplacé poste pour poste par Bereta tandis que Synaeghel incorporera l’équipe.

L’intéressé, écarté, n’est pas content et le fait savoir. « Les déclarations de Roby à la radio ne me conviennent pas du tout. Il aurait pu dire que mon absence a été décidée d’un commun accord. Au lieu de quoi, on a l’impression que je suis carrément écarté de l’équipe et non sérieusement blessé.» Crise à résoudre donc, mais la finale d’abord.

Les Monégasques logent à Versailles, presque logique pour une équipe princière, et parmi eux l’ancien Stéphanois Georges Polny a bien dormi : « J’ai fait avant-hier un rêve merveilleux. Nous enlevions la Coupe devant Saint-Etienne 2-1.» Le joueur a rejoint la Principauté en 1972 et, à 31 ans, y retrouve une seconde jeunesse.

Le président Giscard d’Estaing ne rêve probablement pas à la finale, mais il se murmure qu’en tant qu’Auvergnat il pencherait du côté des Verts. Les supporters se rappellent de ses encouragements, il y a six ans, pour la finale 1968.

Jour J

Les Verts l’emportent mais les Monégasques ont vraiment bien joué. Heureusement, qu’intrinsèquement, l’ASSE est plus forte avec des individualités supérieures et un collectif si bien huilé. La première mi-temps a vu comme prévu les Stéphanois dominer la partie face aux contre-attaques rouge et blanche. Et puis Monaco s’est montré de plus en plus dangereux dans le dernier quart d’heure et c’est comme un coup de poignard qui l’a surpris juste avant la mi-temps. La tête plongeante de Synaeghel, à 50 centimètres du sol, trompe Montès.

Rebelote en seconde période. Monaco réagit mais c’est Merchadier, tout juste entré en jeu, qui reprend un ballon repoussé par le gardien. 2-0. A la 65e, Onnis réduit la marque et les Verts font parler le métier sans trop briller pour préserver le score. La fin de match est nerveuse et heurtée. L’expérience du champion l’emporte finalement pour un troisième doublé. Polny montre ses regrets : « Les Stéphanois n’étaient pas si intouchables ce soir… »

De l’autre côté, Larqué l’avoue, ils étaient fatigués. « Notre victoire a été longue à se dessiner car notre sprint final en championnat nous a quelque peu émoussés ».

Le mot de la fin est pour Patrick Revelli qui résume bien la rencontre : « Nous avons tout de même fait une grande partie du jeu mais notre second but paradoxalement a libéré les Monégasques. À partir de cet instant, ils ont été plus dangereux et c’est un peu ce qui explique leur domination dans les dernières minutes ». L’important est la victoire, et à l’année prochaine !

14 juin 1975

ASSE-Lens (2-0)

Et Larqué reprit la balle de volée…
Que le club a changé en si peu de temps. 15 auparavant, l’ASSE perdait sa première finale face à Monaco et il n’y avait rien à redire. En 1975, le club est non seulement le plus puissant de France mais appartient aux quatre plus forts d’Europe.

J-3

Robert Herbin a un problème de riche : il dispose de 14 joueurs en pleine forme pour onze postes. À part les égos, c’est idéal pour ramener un trophée, un doublé, le quatrième et le second consécutif : «Un exploit unique dans les annales du football», selon le président Rocher.

Pour Herbin, il s’agit de la sixième finale comme joueur ou entraîneur, il les a toutes vécues. Son effectif, hormis Bereta transféré à Marseille quelques mois plus tôt, est inchangé par rapport à la finale 1974. Un avantage. En cas de victoire, l’ASSE rejoindrait le Red Star, le Racing-club de Paris, Lille avec cinq trophées. Seul l’Olympique de Marseille est devant avec huit coupes. Lens est plus inexpérimenté. Il s’agit de la seconde finale pour les nordistes après 1948 et une défaite 3-2 face à Lille.

J-2

La préparation lensoise dans la campagne nordiste est joyeuse entre footing et tennis-ballon. Leclercq, déjà blond mais encore druide, porte un œil au beurre noir avec un choc avec Lecœur à l’entraîneur. « Je vais être beau si par hasard, nous devons aller fêter notre succès au Lido ».

L’entraînement artésien, Arnold Sowinski se montre confiant malgré Sainté : «Mes joueurs sont méconnaissables cette semaine. Ils sont détendus, décontractés, ils attendent samedi soir dans de bonnes conditions. Nous jouerons sans souci. Avec les supporters que nous avons, nous pouvons faire des miracles même devant la belle machine stéphanoise».

Un des conducteurs de la machine verte, Ivan Curkovic, ne prend pas les Sang et or à la légère. « Lens est une équipe qui nous a constamment posé des problèmes. Les Lensois ont toujours réussi à marquer les premiers. En finale de coupe, nous devons éviter ce genre de répétition. Il ne faudra pas jouer aveuglément et rester conscient que notre force réside dans notre fonds de jeu ».

J-3

Les joueurs stéphanois sont confiants à l’image d’Hervé Revelli, absent sur blessure en 1974: «Nous sommes en position de force et Lens n’est que challenger!» Mais comment gérer une finale nationale quand on a goûté à l’ivresse de la coupe d’Europe des clubs champions.

«La saturation, je n’y crois pas, se défend Herbin. Pour une finale de coupe de France, je serais le premier étonné de voir un joueur blasé ». L’équipe lensoise ressemble aux champions de France. Les rôles sont interchangeables comme le préconisent les tenants du football-total et le danger peut venir de partout. Le point faible se situe en défense. Et c’est peut-être pour cela que l’ASSE va peut-être essayer de démarrer fort pour faire la décision rapidement. On verra bien.

Jour J

Les Verts ont gagné, c’était prévu mais la finale a été belle car les Lensois ont bien joué, ont résisté, voire répondu par moments. Les trois occasions dans les trois premières minutes de jeu de Sarramagna, Farison et Bathenay ont donné le ton. Les champions proposent du spectacle mais ne produisent malheureusement pas l’étincelle… et c’est finalement Lens qui a la meilleure occasion de la première période avec Leclercq dont le tir est détourné sur la barre par Curkovic.

La leçon est appliquée après le repos avec une montée de Piazza, un une-deux avec Hervé Revelli pour l’ouverture du score de l’Argentin. «Nous avons profité de la fatigue de Lens qui a fait le jeu. Peut-être étions nous mieux préparés physiquement et moralement ».

Ça c’est pour le résultat et la prime de victoire. Le chef d’œuvre et la beauté des yeux arrivent ensuite. Janvion, lancé par Patrick Revelli centre pour Larqué. La suite est racontée par le capitaine buteur. « Janvion arrête un centre à mi-hauteur très précis. Un défenseur lensois m’a alors caché le ballon et j’ai pensé qu’il allait écarter le danger. Pourtant, le cuir est arrivé vers moi à mi-hauteur. J’ai alors tenté la reprise de volée en me couchant du côté gauche. En tombant, j’ai vu le ballon pénétrer dans les filets sous la transversale ». Voilà un but dont on reparle, la preuve, encore en 2020.

Il parait que le président Giscard d’Estaing a applaudit pendant près d’une minute. Avant d’offrir le trophée à Larqué, un geste auquel les deux hommes commencent à être habitués.

18 juin 1977

ASSE-Reims (2-1)

La 6e victoire dans un dernier sursaut
La finale de Glasgow s’est déroulée il y a à peine plus d’un an et tant de choses ont changé… Pour la première fois depuis 1973, l’ASSE n’est pas championne, l’équipe vieillit et certains éléments se montrent moins décisifs comme Curkovic face à Liverpool en coupe d’Europe. Les Stéphanois sont malgré tout en demi-finale de la Coupe de France. Mais voilà, ils ont pris 3-0 à Marcel-Saupin. Le match retour s’annonce comme une mission impossible…

J-4

5-1. Les Stéphanois l’ont emporté 5-1 à Geoffroy-Guichard et sont ainsi qualifiés pour la finale. Ils ont marqué deux buts dans les cinq dernières minutes et ont montré qu’ils ne sont pas peut-être pas tout à fait morts. Pas encore. Y-a-t-il y une autre équipe en France capable de renverser d’aussi hautes montagnes ? Pas sûr. La qualification et le nombre de buts marqués ne cachent néanmoins pas le secteur à renforcer : on parle de l’avant-centre Bastiais Jacques Zimako pour la saison prochaine. Avant cela, il reste un match à gagner et un titre à emporter.

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Saint-Étienne/Reims, pour la 60e finale de Coupe de France est une affiche prestigieuse entre les deux clubs qui ont le plus marqué l’histoire du football français. Pas grand monde ne pensait que les Verts allaient la jouer, alors autant ne pas repousser les vacances d’une semaine pour rien. Surtout qu’il y a de l’enjeu comme le rappelle le président Rocher : « Cette finale a une signification différente de toutes les autres. Elle nous rappelle celle de 1962 qui nous a permis de jouer la Coupe des coupes. Toutes les autres coupes ont été précédées par un titre. Cette année, elle nous permet de joueur la coupe d’Europe puisque les autres places nous ont été barrées ».

Enfin, cette rencontre a un petit goût de nostalgie… Jean-Michel Larqué est en partance pour le Paris-Saint-Germain tandis qu’Hervé Revelli joue sans doute sa dernière finale…

J-1

Les Verts, malgré leur déclin apparent, sont nettement favoris face aux Rémois. Ces derniers ont une équipe jeune dont le milieu de terrain paraît bien tendre face aux Santini, Janvion et Bathenay. Méfiance, tout de même, la fatigue de l’exploit contre Nantes peut se faire sentir.

Alors, cela reste un match de football dont on ne peut deviner le score à l’avance et le buteur champenois Bianchi le rappelle bien : «J’ai confiance, Reims peut gagner. A mon avis, le premier but sera capital. Et ce peut très bien être Reims.»

Il a failli avoir raison !

Jour J

L’ASSE est en train de perdre la finale jusqu’à huit minutes de la fin. Décidément, ne peuvent-ils pas gagner sereinement dans ces années 1970 ? Faut-il toujours qu’ils se mettent en difficulté ? Et comme d’habitude, ils vont s’en sortir…

Les Rémois ont accepté d’être dominés dès le début du match et misent sur les contre-attaques. Ils jouent durs, commettent des fautes et se montrent aussi dangereux. Ils marquent ainsi au début de la seconde mi-temps. Les Verts réagissent, Hervé Revelli se voit refuser un but. L‘arbitre a-t-il voulu ensuite compenser ? Car le pénalty accordé à Bathenay à la 83e peut se discuter… Les Rémois espèrent alors la prolongation.

Mais à l’expérience, l’ASSE l’emporte d’une tête de Merchadier, l’habituel remplaçant, aujourd’hui décisif. L’expérience. Et un peu de chance aussi. «Ce ne sera pas toujours possible de jouer à l’énergie, surtout qu’il y a moyen de faire autrement» ,déclare Bathenay. C’était peut-être le seul moyen de gagner pour une équipe à bout de souffle.

Heureusement, Pierre Garonnaire, le recruteur, a repéré un jeune joueur de la sélection de Provence en lever de rideau. «Il me rappelle Raymond Kopa et de plus il ne craint pas les chocs. Il viendra probablement à Saint-Étienne.» Il s’appelle Laurent Paganelli.

13 juin 1981

Bastia-ASSE (2-1)

Cette fois, il n’y a pas eu d’exploit…
La situation a un petit air de déjà vu… Les Verts sont champions et en finale. En route pour un autre doublé, le cinquième. Les Verts ont changé depuis 1977, des hommes sont partis, d’autres arrivés comme les stars Platini, Rep ou Zimako.

J-2

Difficile de bâtir une équipe… L’infirmerie pourra bientôt aligner ses onze joueurs : Zanon, Gardon, Bellus, Janvion, Elie, Zimako, Paganelli, Larios ! Certains pourraient néanmoins jouer au Parc des Princes. Tout dépendra de l’avis du toubib et des derniers tests à l’entraînement. Et Herbin pourra jouer aux chaises musicales en plaçant Janvion à la place de Gardon et glisser Primard à gauche de la défense etc.

Côté Bastiais, l’entraîneur Antoine Redin a son équipe au complet et un homme en forme : Roger Milla. Jean-François Larios, blessé depuis des semaines à l’abdomen les connaît bien pour avoir joué au Sporting. «Ce sera très très dur parce que défensivement les Bastiais sont très forts. Et puis, des hommes comme Mercialis, Milla et Henry sont en excellente forme.»

Milla est l’homme qui inquiète le plus les Stéphanois. «Milla sera le plus dangereux. J’avais joué contre lui au Cameroun lors de la première tournée de l’ASSE. Il était ailier gauche. Il improvisait sans cesse, Gardon doit bien le marquer», avertit Janvion.

Le mot de la fin pour Zimako que l’ASSE a fait venir de… Bastia en 1977 et qui a toute sa belle-famille sur l’île. «Pour eux, c’est une énorme surprise d’arriver en finale d’autant que leur saison n’a guère été brillante. Tous ne se font que très peu d’illusions. Sur un grand terrain comme celui du Parc, les Corses seront handicapés.» Pourtant, contrairement aux certitudes de l’attaquant stéphanois, les observateurs jugent cette rencontre plus équilibrée que le classement du championnat.

J-1

Si la finale se termine sur un nul à l’issue des prolongations, le match se rejouera à Marseille le mardi suivant. Et les vacances seront raccourcies… L’ASSE évoluera finalement sans Larios ni Zanon mais Janvion, Elie et Zimako seront bien là. Bastia n’a joué qu’une finale. C’était face à Marseille en 1972 (victoire phocéenne 2-1). Étonnamment, ils joueront de manière libéré et sans pression : l’ASSE étant championne, ils joueront la Coupe des coupes.

Côté stéphanois, pas le choix : le président Rocher veut tout, et le championnat, et la coupe. Le capitaine Lopez devra aller chercher le trophée des mains du président François Mitterrand.

Jour J

Le miracle n’a pas eu lieu. C’était possible dans les années 1970, cela ne semble plus l’être dans la décennie suivante. Les Verts jouent mal, reculent et laissent les Bastia avoir l’emprise sur le match. Si le score reste vierge à la pause, Mercialis et Milla, pourtant surveillé, marquent coup sur coup. Logiquement.

Un retard de deux buts est un menu idéal pour écrire un nouvel exploit. Il n’aura pas lieu et la réduction du score de Santini sur penalty exacerbe les regrets.

Rien à dire, Bastia a mieux joué et mérité de gagner. Rocher, pourtant si ambitieux se montre beau joueur. « Nous nous sommes véritablement mis en action seulement après avoir encaissé deux buts. Dans l’esprit de cette compétition, Bastia a été supérieur à nous ».

15 mai 1982

PSG-ASSE 2-2 (6-5 aux tab)

La fin d’une époque
Les Stéphanois ont battu Bastia. Ils ont pris leur revanche en demi-finales de la Coupe de France 1982. En finale, ce sera le PSG. C’est un club neuf, fondé en 1970 et dont le président Borelli a employé les gros moyens pour montrer une belle équipe. Cela n’a néanmoins pas fonctionné en championnat. C’est une équipe par intermittence qui a eu de la chance en demi-finales face à Tours. Leur gardien Baratelli a stoppé quatre tirs au but ! La vérité d’un match n’est toutefois pas celle du suivant. Un élément important à retenir : contrairement aux Verts, les Parisiens devront gagner s’ils veulent jouer la coupe d’Europe la saison prochaine.

J-2

L’ambiance est pesante autour de la rencontre. L’ASSE est en crise et tout le monde le sait depuis le 1er avril. Le président Rocher est contesté et l’entraîneur Herbin fait partie des opposants. «Cette affaire n’a pas d’incidence sur l’équipe», assure Zanon. N’empêche… On parle peu du terrain et pas mal des affaires. Comme les départs éventuels de Larios en Angleterre, de Lopez à Monaco, de Platini à la Juve. Faut-il repartir avec une équipe de jeunes comme en 1972 ? Les haines se sont accordées une trêve le temps de la finale et ont prévues de reprendre dès le lundi. «Je vais avoir une explication sereine avec Herbin», temporise Rocher pourtant peu habitué à la diplomatie. En face, Herbin prévient : «Je suis entraîneur général de l’ASSE et si je suis viré, il y aura un procès.» Ambiance…

J-1

Bonne nouvelle, Larios reste ! La finale est inédite entre deux chouchous du public parisien. La rencontre révèle plusieurs enjeux. Pour le PSG, c’est une première de sa jeune histoire tandis que l’ASSE ne l’a jamais emporté au Parc en championnat. Deux grands joueurs disputent leur dernier match et voudront laisser leur trace : Surjak à Paris et Platini à Sainté.

Duel de gardiens de but entre Castaneda et Baratelli, et le vainqueur prendra l’ascendant psychologique en équipe de France lors du Mundial espagnol imminent. Enfin, Bathenay et Rocheteau seront sur le terrain vêtus de… blanc… « Il est évident que cette finale contre Saint-Etienne présente pour moi un caractère particulier. J’y attache pour ma part une importance énorme.»

Herbin se méfie de ses anciens joueurs. «Bathenay et Rocheteau constitueront des dangers permanents. Le marquage individuel ne devra jamais être relâché.» Cela va être une finale choc !

Jour J

Un sentiment désagréable. Une finale que les Stéphanois auraient pu et dû gagner et qu’ils ont laissé échapper. Le match est beau, enlevé et passionnant jusqu’au bout. Le PSG n’a pas loupé son rendez-vous et l’ASSE n’a pas justifié son statut de favori. Surtout, contrairement à 20 ans d’histoire, ce sont les Stéphanois qui se sont fait reprendre…

Ils menaient 2-1 en prolongations, l’arbitre allait siffler la fin quand Rocheteau s’est arraché pour égaliser. Rocheteau, oui… Le terrain est alors envahi et il faudra près de 30 minutes pour jouer les tirs au but.

Personne ne veut tirer le dernier alors le capitaine Lopez s’élance et loupe. «À deux minutes de la fin, nous y croyions vraiment. Les Parisiens ont eu plus de chance pendant tout le match», analyse dépité Zanon.

Herbin est, lui, plus remonté. «Il est très difficile, voire impossible de jouer un match dans ces conditions. Le terrain a été envahi ! »

C’est fini, l’ASSE vient de perdre la finale, sa neuvième et personne ne se doute qu’elle n’en rejouera pas pendant près de 40 ans et pire, que le club va s’enfoncer dans une crise dont il ne sortira sans retrouver sa splendeur…