Les métiers anciens
se meurent,
ils les ressuscitent

Expériences communes #18

Photo Philippe TRIAS

Photo Progrès/Philippe TRIAS

Photo Philippe TRIAS

Ruffey-sur-Seille

L’homme qui prend soin des sabots des chevaux

Simon Vandromme, 28 ans, maréchal-ferrant basé à Ruffey-sur-Seille, exerce dans les écuries de la région Bourgogne Franche-Comté. Il perpétue le métier avec deux associés.

Les gestes sont précis, vifs. Le cheval ne bronche pas. Simon Vandromme nettoie, coupe, racle, lime le sabot et la corne de ce dernier pour ajuster le nouveau fer qui va être posé à la bête.
« Toutes les six à huit semaines, on vient changer les fers des chevaux, explique le maréchal-ferrant. Le sabot pousse, comme un ongle. Et il faut sans cesse le réajuster ainsi que les fers. »

Âgé de 28 ans, le jeune homme est basé à Ruffey-sur-Seille avec deux autres maréchaux-ferrants. Il intervient dans les centres équestres, chez les particuliers, pour des cavaliers de concours, dans le Jura, en Saône-et-Loire, dans l’Ain…
Après un Bac S, et après avoir hésité avec le métier de vétérinaire, ce passionné d’équitation s’est orienté vers un CAP de maréchal-ferrant de trois ans dans une école spécialisée de Verdun puis a poursuivi avec un brevet technique des métiers.

Du sur-mesure en fonction des chevaux
et de leurs pathologies

« Cela m’a permis d’en apprendre davantage sur l’orthopédie et l’anatomie du cheval, indique-t-il. Nous avons aussi eu des cours de vétérinaire ».
« Pour faire ce métier, il faut de la patience, de la précision, de la force. La posture n’est pas évidente. C’est un métier fatigant mais très intéressant. On cherche à rendre le cheval plus fort, qu’il ait du confort. C’est un métier ancien mais actuel, poursuit-il. Fondamentalement, il reste le même qu’avant, même si certaines techniques et matériaux ont changé. »
Les fers sont préformés, mais tout est sur-mesure. Ils sont ensuite chauffés et travaillés pour être adaptés au sabot du cheval.

« Nous posons des fers classiques, mais aussi orthopédiques si le cheval a des problèmes de pied ou de tendon. On joue sur l’épaisseur, la largeur… Certains fers sont en aluminium. Nous en avons même en plastique. Une intervention pour les quatre sabots du cheval demande environ une heure. »

Renaud LAMBOLEZ

Saint-Germain-lès-Arlay

Elle fait de la dentelle
à la main avec des fuseaux jurassiens

Par Constance LONGOBARDI

Démonstrations, expositions, cours, stages… Dominique Bauduin, dentellière, parcourt la région.

Elle transmet un savoir-faire qui prend ses racines au XVe siècle, au Puy-en-Velay : la dentelle aux fuseaux. Dominique Bauduin, auto-entrepreneure, ne passe pas une journée sans penser à ce tissu. Quand elle n’en fait pas chez elle, à Saint-Germain-lès-Arlay, elle dispense des cours et des stages. Elle expose aussi son travail sur les salons de la région. Ici, pas de machine.

« Ça n’a pas la même valeur. En une journée, les entreprises réalisent plusieurs mètres, insiste Dominique. Moi, je fabrique des pièces à ajouter sur un vêtement, pas le vêtement en entier. » Elle confectionne également des cadres, des bijoux ou encore des ronds de serviettes.

Les fuseaux fabriqués à Hautecour

La dentellière pose sur ses genoux un carreau traditionnel, son support de travail, et utilise un modèle. Celle qui est allée en Haute-Loire pour maîtriser la technique l’assure : « Ça s’apprend très vite. Avec les fuseaux, on fait des croisements de fils et on les maintient avec des épingles. Quand on a appris les points de base, on peut réaliser plein de choses. »

Au fur et à mesure de la confection, un tambour tourne. « C’est de la dentelle au kilomètre », décrit-elle.

La petite touche locale : des fuseaux fabriqués par la tabletterie Richard, à Hautecour.

Voilà dix ans que la Jurassienne s’adonne à sa passion. « Ça permet de décompresser », conclut-elle.

18 € : c'est le prix de l’heure de cours,
150 € les cinq séances de deux heures,
300 € la semaine de stage

Contact : 06.87.30.74.73.

MANTRY

Faudesteuil, des sièges
entre tradition
et modernité

Catherine Duperchy, tapissier à Mantry. Elle rénove des sièges, fauteuils, chaises entre tradition et modernité. Le nom de son entreprise, "Faudesteuil" comme les fauteuils d'antan.  Photo Progrès/Philippe TRIAS

Catherine Duperchy, tapissier à Mantry. Elle rénove des sièges, fauteuils, chaises entre tradition et modernité. Le nom de son entreprise, "Faudesteuil" comme les fauteuils d'antan.  Photo Progrès/Philippe TRIAS

Catherine Duperchy, tapissier à Mantry. Elle rénove des sièges, fauteuils, chaises entre tradition et modernité. Le nom de son entreprise, "Faudesteuil" comme les fauteuils d'antan.  Photo Progrès/Philippe TRIAS

Catherine Duperchy est tapissier à son compte chez Faudesteuil. Qu’elle y ajoute ou non une touche contemporaine, elle veille à conserver l’authenticité et le confort des sièges. Chez Faudesteuil, Catherine Duperchy redonne une nouvelle vie à vos sièges.

Ne dites pas “tapissière”. « Ce n’est pas le féminin de tapissier », insiste celle qui propose des réfections partielles ou complètes. La Jurassienne a d’abord travaillé dans le social, avant de suivre une formation qualifiante à l’Afpa, dans l’Aveyron. C’était en 2010.

« J’aime tout dans ce métier : les structures, les tissus, le dégarnissage… Les outils et les matériaux sont à l’identique depuis 150 ans, confie-t-elle. Je veux protéger et transmettre un savoir-faire. »

Catherine reçoit les clients dans son atelier à Mantry : « Je travaille seule mais je construis le projet avec eux. Ils sont très attachés à leurs sièges. Ce sont des travaux chargés d’émotion et d’attention. » Parfois, elle retrouve même de petits objets — boutons, pièces, etc. — qu’elle restitue à la famille, comme un héritage.

« De l’actuel sur des structures anciennes »

Son projet du moment : la réfection d’un fauteuil de 1760, avec une soie de Lyon. « J’ai rarement des pièces aussi anciennes, s’enthousiasme-t-elle. Je travaille plutôt sur des sièges à partir de 1830 : des Voltaire, des Henri II… »
« J’ai une sensibilité particulière pour le traditionnel mais je ne suis pas une intégriste, poursuit-elle. J’aime proposer de l’actuel sur des structures anciennes. »

Pour la réfection complète d’un fauteuil, trois journées de travail sont nécessaires. Tissus compris, il vous en coûtera 900 à 1 000 € avec une garantie de 60 ans.

C.L.

> Faudesteuil, 967 rue du Taureau, lieu-dit Mauffans, Mantry. Tél.06.71.02.99.96. Sur rendez-vous.

ROSAY Frédéric Dehlinger exerce un vieux métier plein d’avenir

Lunettes de protection vissées sur le nez, long marteau en main et grande blouse noircie par le travail, Frédéric Dehlinger ne rechigne pas à la tâche, dans son petit atelier de Rosay. En 2019, le quadragénaire a lancé l’Arbre-lune, une entreprise d’artisanat dans laquelle il conçoit des objets faits de métaux et de bois, avec « le souci de recycler les matières. Je ne suis pas dans une démarche nostalgique. Je pense que les logiques d’esprits du passé peuvent nous aider à concevoir l’avenir. »

Originaire du bassin industriel lorrain, cet ancien enseignant technique en lycée agricole a quitté la fonction publique il y a plusieurs années. Installé dans le Jura depuis 2012, il a été confronté « à la question de l’outillage il y a trois ans, lors de travaux dans ma maison. Cela a été le début d’une réflexion », explique-t-il.

Désormais, le Jurassien est dans le domaine de la « taillanderie, c’est ce qui se rapproche le plus de ce que je fais ».

Pourquoi cette reconversion ? « C’est à la fois un virage personnel pour vivre une autre vie, renouer avec un geste, et s'engager dans un projet de société plus respectueux de l’environnement », résume-t-il.

« Recréer une solidarité locale »

Au-delà d’agir dans un but environnemental, le Jurassien de 44 ans souhaite recréer une solidarité locale. « Je m’efforce d’acheter mon outillage chez les fournisseurs locaux. » Par ailleurs, il fabrique des objets "utiles" comme ce sapin de Noël fait de métal, réutilisable tous les ans.

Vincent MOIRE

Dole : luthier, un métier toujours d’actualité

Anette Osann, en plus de sa formation en lutherie, s’est  spécialisée dans la fabrication de nyckeharpas.  Photo Progrès /Loris TRULLARD

Anette Osann, en plus de sa formation en lutherie, s’est spécialisée dans la fabrication de nyckeharpas.  Photo Progrès /Loris TRULLARD

Anette Osann, en plus de sa formation en lutherie, s’est spécialisée dans la fabrication de nyckeharpas.  Photo Progrès /Loris TRULLARD

Anette Osann a ouvert son atelier de lutherie à Dole en 2007. Elle révise et répare certains instruments du quatuor à cordes comme le violon, l’alto et le violoncelle. La luthière, qui s’est formée en école de lutherie allemande, est spécialisée dans la fabrication de nyckelharpas. Cet instrument traditionnel d’origine suédoise a vite séduit Anette Osann. « La sonorité des cordes et la manière de jouer du nyckelharpa, à l’aide de touches pour tendre la corde, me passionnent », explique la spécialiste, qui fabrique et vend ses propres modèles.

 Anette Osann. Photo Progrès /Loris TRULLARD

Anette Osann. Photo Progrès /Loris TRULLARD

Anette Osann. Photo Progrès /Loris TRULLARD

La conception d’un seul exemplaire prend deux mois à la musicienne. « On part d’une pièce en bois puis on découpe, on rabote, on vernit et enfin on règle l’instrument. »

Anette Osann, en plus de son atelier rue des Vieilles-Boucheries à Dole, enseigne cet instrument en Allemagne, en Italie et à l’atelier Karovan aux intéressés, qui ont entre 6 et 55 ans. « Ce métier artisanal existera tant que les musiciens existeront, il a donc encore un bel avenir devant lui », s’exclame la passionnée.

Chaux-des-Crotenay

Il a choisi d'être sanglier

De notre correspondant, Gilles Philippe

Laurent Jeannin prélève des sangles sur des épicéas dans les forêts du haut Jura. Photo G. Philippe

Laurent Jeannin prélève des sangles sur des épicéas dans les forêts du haut Jura. Photo Progrès/G. PHILIPPE

Laurent Jeannin prélève des sangles sur des épicéas dans les forêts du haut Jura. Photo Progrès/G. PHILIPPE

Laurent Jeannin est originaire du Creusot (Saône-et-Loire). En 2015, il s’est installé à Chaux-des-Crotenay pour devenir sanglier. Ce sont des amis jurassiens qui lui ont fait découvrir ce métier qui consiste à prélever des sangles sur des grumes d’épicéas. Ces sangles servent à cercler les fromages mont d’Or. « Ce métier me convient parfaitement car je suis indépendant. Je travaille au calme en forêt et j’organise mes journées comme je veux. Je travaille souvent le week-end et ainsi je peux rester chez moi les jours de semaine où il fait trop mauvais. »

Il n’utilise que quelques outils peu coûteux comme le plumet et la cuillère avec laquelle il prélève le liber qui se trouve entre l’écorce et le bois. « À cause de la sécheresse et des scolytes, j’ai des difficultés à trouver des grumes d’épicéa saines pour faire de belles sangles et celles qui viennent des pays de l’Est nous font de la concurrence », déplore-t-il. Mais, heureusement pour la vingtaine de sangliers qui font ce métier dans le Jura, Laurent Jeannin a constaté que la plupart des fabricants de fromages préfèrent les sangles issues du massif du Jura.