La rue de la Charité

ou la voie de l'hospitalité

Étendue de la place Bellecour au cours de Verdun sur la Presqu'île de Lyon, la rue de la Charité n’a pas toujours été aussi longue - 800 mètres environ.

En 1560, on la connaissait sous l’appellation de « rue de la Madeleine » ou « rue Sainte-Elisabeth » : elle  s’étalait alors jusqu’à la rue Sainte-Hélène. L’usage populaire lui attribua le nom de « rue de la Charité » lorsque l’hôpital éponyme fut achevé au XVIIe siècle (l’établissement de l’Aumône fut décidé en 1531, sous le règne de François Ier, après une période de grande famine). La rue de la Charité fut ensuite prolongée, en 1728 puis en 1772, pour atteindre la dimension qu’on lui connait aujourd’hui.

Vue aérienne de Lyon. Photo Stéphane Guiochon/Le Progrès

Vue aérienne de Lyon. Photo Stéphane Guiochon/Le Progrès

Au fil du temps, philatélistes, artisans et commerçants ont investi cette rue familiale aux allures de petit village, à l’ombre de l’immensément grande et touristique place Bellecour. Restaurants, magasins de décoration, hôtels, commerces de bouche, établissements scolaires... On pourrait presque vivre en autarcie, rue de la Charité.

Dans cette rue familière, prise entre deux fleuves, les visiteurs s’y laissent happer, pour se rendre dans l’un des derniers monuments rescapés de Lyon, le Musée des Tissus et des Arts décoratifs.

Suivez-nous, on vous emmène en immersion dans une rue historique de Lyon.

Au niveau du lycée Récamier, rue de la Charité.

Le commissariat de police fait l'angle des rues de la Charité et de Condé.

Aux abords du musée des Tissus, rue de la Charité.

Au niveau du lycée Récamier, rue de la Charité.

Le commissariat de police fait l'angle des rues de la Charité et de Condé.

Aux abords du musée des Tissus, rue de la Charité.

Au n°34

Le Musée des Tissus
et des Arts décoratifs :

deux musées pour le prix d'un

Photo Marion Saive/Le Progrès

Photo Marion Saive/Le Progrès

Le musée des Tissus (hôtel de Villeroy) et le musée des Arts décoratifs (hôtel de Lacroix-Laval). Images Marion Saive/Le Progrès

Le musée des Tissus (hôtel de Villeroy) et le musée des Arts décoratifs (hôtel de Lacroix-Laval). Images Marion Saive/Le Progrès

Le Musée des Tissus et le musée des Arts décoratifs (MTMAD) se situent sur la même parcelle de 8000m².

Les deux hôtels privés du XVIIIe siècle (Villeroy et Lacroix-Laval) abritant ces deux musées, présentent plus de 2 millions de pièces différentes couvrant 4500 ans d’histoire sur 4000 m² d'exposition (à savoir que pour des raisons de conservation, des roulements sont effectués pour sortir de la réserve les œuvres qui seront mises en avant pendant quatre mois environ, ce qui signifie que seul 1% de la collection n'est visible par le public au quotidien).

On vous propose une rapide visite en vidéo:

Longtemps menacé de fermeture (la Chambre de commerce et d'industrie de Lyon, propriétaire des lieux, ne pouvait plus assumer son coût de fonctionnement), le musée des Tissus et des Arts décoratifs de Lyon est passé sous la coupelle de la Région Auvergne Rhône-Alpes en 2018. Laquelle s’est engagée à financer 50 millions d’euros dans le cadre d'un "plan de renaissance du musée".

Début 2020, de gros travaux seront entrepris pour réaménager ces deux musées, qui manquent notamment d'accès pour les personnes handicapées.

> Musée des Tissus et des Arts décoratifs, 34 rue de la Charité, Lyon 2e. Ouvert du mardi au dimanche 10 à 18 heures. A voir jusqu'au 31 octobre, l'exposition "Un homme de la Renaissance : Olivier de Serres" (plus d'informations sur le site Internet du musée).

MTMAD
MTMAD

L'hôtel de Villeroy en 1900. Archives municipales de Lyon (réf: 1PH 158)

L'hôtel de Villeroy en 2019. Photo Marion Saive/Le Progrès

L'hôtel de Villeroy en 1900. Archives municipales de Lyon (réf: 1PH 158)

L'hôtel de Villeroy en 2019. Photo Marion Saive/Le Progrès

Au n°4

Le Café de la Cloche :

un lieu de vie et d'histoire

Photo Marion Saive/Le Progrès

Photo Marion Saive/Le Progrès

Philippe Bitat est un des doyens de la rue de la Charité. « Même à 47 ans ». Le gérant du mythique Café de la Cloche, au numéro 4 de la rue, a repris le zinc en 2002, après l’avoir partagé avec son père pendant une dizaine d’années. Lui-même avait racheté le bistrot en 1989.

Philippe Bitat. Photo Marion Saive/Le Progrès

Philippe Bitat. Photo Marion Saive/Le Progrès

Par deux fois, en 2009 puis en 2016, le Café de la Cloche a été frappé par les assauts des fonds de pension, propriétaires des murs, désireux d’augmenter le loyer. Par deux fois, le troquet a résisté. Grâce à un réseau de fidèles, mobilisés pour faire perdurer ce lieu créé dans les années 1930, devenu incontournable pour bon nombre de Lyonnais.

Régulièrement, des cafés-débats sont organisés au café de la Cloche, sur des thèmes variés : statistiques, amour, économie, environnement... Photo d'archives Le Progrès

Régulièrement, des cafés-débats sont organisés au café de la Cloche, sur des thèmes variés : statistiques, amour, économie, environnement... Photo d'archives Le Progrès

Les Lyonnais y débattent économie, philo et santé autour d'une bière ou d'un café

A son arrivée, Philippe a donné une nouvelle impulsion à son café. En a fait un lieu de débats et conférences, sur des thèmes variés, en lien avec diverses associations lyonnaises. Ainsi, plusieurs fois par semaine, les curieux se regroupent à la Cloche, débattent économie, philosophie, astrologie, statistique, amour, santé, environnement, autour d’une bière ou d’un café. L’après-midi, des « cafés-tricots » s’organisent.

Les fonctionnaires de la Poste et des Finances publiques partagent une table ou une banquette aux côtés d’étudiants et d’ouvriers, de passage pour un demi ou un café. Touristes et habitués viennent à l’heure du déjeuner, manger une « vraie quenelle », une part de quiche ou une bonne andouillette. « Simple, mais fait-maison ».

La fresque de la Charité peinte par Vincent Gallo dans les années 1990. Photo Marion Saive/Le Progrès

La fresque de la Charité peinte par Vincent Gallo dans les années 1990. Photo Marion Saive/Le Progrès

Une étape dans les circuits touristiques

Parfois, des guides touristiques font irruption avec leurs groupes. La Cloche est devenue une étape dans leur circuit : elle abrite la « fameuse fresque de la Charité », tout au fond du bistrot. Une peinture de 4 mètres de long, réalisée par Vincent Gallo, un « gone d’origine italienne » au début des années 90, d’après des cartes postales du début XXe mises bout à bout. La seule vue panoramique existante de cette époque, avec bien entendu, l’hôpital de la Charité représenté.

Incrusté dans la façade de l’église, à gauche de l’entrée, on aperçoit un tourniquet. Au XIXe siècle, les Lyonnais dans le besoin abandonnaient là les enfants dont ils ne pouvaient s’occuper. Le poupon était déposé dans l’habitacle. Une cloche était actionnée pour alerter les sœurs hospitalières de la présence de l’enfant. Au Café de la Cloche, on raconte que les sœurs couraient agiter un tissu blanc à la fenêtre pour alerter les médecins, installés au troquet, de l’arrivée du rejeton.

Café de la Cloche dans les années 1930. Photo d'archives transmise par Philippe Bitat - Café de la Cloche

Café de la Cloche dans les années 1930. Photo d'archives transmise par Philippe Bitat - Café de la Cloche

Le café de monsieur et madame tout-le-monde

Au café de la Cloche, tout rappelle l’hôpital de la Charité, construit en 1617 et détruit en 1934. A l'époque, la Charité accueillait beaucoup de gens désœuvrés. Clin d’œil à l’histoire, Philippe a mis en place le « café suspendu » : les clients peuvent payer en avance un café, destiné à une personne dans le besoin qui ne peut le régler.

« La Cloche, ce n’est pas le café des riches, c’est celui de monsieur et madame tout-le-monde », maintient Philippe, crâne clairsemé et lunettes fines aux branches noires et rouge entremêlées. Il se souvient de la dernière Coupe du monde, « c’était pire qu’en 98, de la pure folie, plus personne ne pouvait rentrer tellement on était serrés ».

Après trente-cinq ans de service, le fana de philo, marié à une enseignante et père d’un petit garçon, veut s’accorder une trêve. Et cherche un repreneur pour prendre la suite du mythique troquet de la la Charité (à lire ici). Avant de laisser son zinc, l’enfant de Tassin veut s’assurer que le futur acquéreur conservera l’authenticité du lieu, « resté dans son jus » depuis de très longues années. Ses banquettes en cuir carmin, ses tables rectangulaires aux plateaux de marbre et pieds en laiton, ses miroirs piqués de tâches noires, sa frise peinte et ses luminaires néons au plafond, sa mosaïque granito au sol... Et ses multiples cloches, emblèmes du lieu, cachées dans ce décor des années 1930.

> Café de la Cloche, 4 rue de la Charité, Lyon 2e. Ouvert du lundi au vendredi de 7 à 21 heures, et le samedi de 8 à 21 heures (fermé le dimanche). La programmation des conférences à retrouver sur le site internet.

Au n°54

Boucherie Bello :

le seigneur du saignant

Déjà dix ans qu’il a débarqué de son Jura natal pour installer sa boucherie rue de la Charité, et les locaux se demandent bien comment ils faisaient avant son arrivée.

Frédéric Bello, le boucher à la casquette vissée sur la tête, fait l’unanimité avec ses viandes  « bio et gustatives », sélectionnées sur pièce directement chez le paysan.

Après 2-3 ans dans le milieu bancaire puis de l’immobilier (« J’allais tous les jours à reculons au boulot »), l’ex-rugbyman de 25 ans se trouve un stage découverte chez un boucher de Champagnole. Révélation. « Dès 5 heures du mat’, j’avais les mains dans la barbaque, c’était trop bien », se souvient le blond vénitien barbu à la voix rauque. Il enchaîne avec un CAP puis un apprentissage.

« Boucher, ce n'est pas simple.
On bosse dans le sang et dans le froid… »
Frédéric Bello

« Je ne suis pas manuel de base. Mes parents ne sont ni cuisiniers ni dans les métiers de bouche, mais j’ai toujours aimé la cuisine dans son ensemble, les produits bruts », dit-il, avant de sortir son téléphone portable. Il fait défiler les photos de l’élevage de wagyu (ou bœufs de Kobé, race japonaise) qu’il est allé voir dans le Morvan il y a quelques jours, accompagné de ses deux apprentis bouchers – « C’est un métier dur, très procédurier car beaucoup de règles d’hygiène à respecter, on bosse dans le sang et dans le froid… Mes deux jeunes mouillent le maillot pour moi, j’essaye de les remercier à ma façon.  »

« Rencontrer les paysans, voir leurs bêtes, les choisir... C’est ce que je préfère. Plus elles sont belles, plus je les paye cher. Et ça fait plaisir car les éleveurs à qui je les achète vivent bien, ils sont rémunérés au prix juste ». L’ex-3e ligne remonte ses manches de chemise, laissant entrevoir un couteau de boucher tatoué sur son avant-bras.

Chez Bello, les rugbymen côtoient les grands avocats et étudiants lyonnais

« Pendant un temps, j’ai passé tous mes lundis dans les élevages. Personne ne m’a montré comment désosser une bête, j’ai appris sur le tas ». Il s’arrête, salue un rugbyman du LOU de passage dans le quartier. Dans la queue de la boucherie Bello, Sébastien Chabal se mêle aux grands avocats et étudiants lyonnais. « Un bon plat de viande, c’est synonyme de partage, de convivialité. J’essaye de satisfaire tous les budgets, avec des côtes de bœuf classiques à 35 euros le kilo jusqu’à des pièces de bœuf de Galice ou de Kobé à 300 euros le kilo. » En étalage, de l'Angus de la Creuse, de la Bazadaise de Feurs (Loire), du Wagyu du Morvan...

Frédéric Bello (à droite) et le chef cuisinier de son restaurant B.L.O, Morgan Sauzay. Photo Maxime Jegat/Le Progrès

Frédéric Bello (à droite) et le chef cuisinier de son restaurant B.L.O, Morgan Sauzay. Photo Maxime Jegat/Le Progrès

La bonne humeur et le parler vrai du Jurassien ont séduit les gens du quartier. Ce qui a permis à Fred Bello de se développer. Il y a deux ans, il a ouvert une deuxième boucherie à Megève. L’an dernier, rue de la Charité, quand le troquet d’en face où il buvait tous ses cafés a fermé, le boucher a racheté le local, et monté son restaurant, B.L.O. Son chef cuisinier y prépare poires de bœuf, suprêmes de volaille, poitrine de porc et autres morceaux de viande triés sur le volet. Avec, toujours, cette même générosité qui fait la marque de Bello. « Une fois, j’ai dû m’installer à la table de Toulousains pour les aider à finir leurs assiettes car on avait un peu chargé en quantité », se marre-t-il.

Un des plats servis au restaurant B.L.O : poitrine de cochon snackée, potimarron, carottes, jus de viande. Photo Maxime Jegat/Le Progrès

Un des plats servis au restaurant B.L.O : poitrine de cochon snackée, potimarron, carottes, jus de viande. Photo Maxime Jegat/Le Progrès

Frédéric Bello, c'est aussi le plaisir des choses simples. « Parfois, j'ai des envies. Je demande une belle entrecôte à mon chef cuistot, je m'installe seul à table, je coupe mon téléphone, et je savoure. »

> Boucherie Bello, 54 rue de la Charité, Lyon 2e. Ouverte du lundi au vendredi de 8h15 à 13 heures et de 15h30 à 19h30, le samedi de 8h30 à 19 heures.
> Restaurant B.L.O, 37 rue de la Charité. Ouvert du mardi au vendredi de 12 à 15 heures et de 19 à 23 heures, le samedi de 11 à 16 heures. Site Internet :
http://blo-restaurant.com

Au n°7

Le Petit Train bleu :

sur les rails de l'enfance

On le repère de loin, avec sa devanture chromée striée et ses grandes fenêtres arrondies en guise de wagon-vitrines. Le trompe-l’œil est efficace, on se trouve face à une rame de train.

Le magasin de modélisme ferroviaire Le Petit Train bleu a ouvert en 1953, à l’angle des rues de la Charité et Sala. Son fondateur, M. Malatier, représentant pour les huiles Berliet, l’avait nommé ainsi en hommage au tramway bleu nuit du Val de Saône qu’il empruntait depuis le quai de la Pêcherie pour rentrer chez lui à Couzon-aux-Monts-d’Or. Le mordu de jouets avait fait de sa boutique une référence en matière de trains miniatures. 66 ans plus tard, rien n’a changé dans cette échoppe de 100 m².

4000 références de locomotives

Du sol au plafond, sur les présentoirs et dans des bacs en plastique, tout un éventail de coffrets, rails, éléments de décor et tubes de peinture pour créer et monter son propre circuit ferroviaire. Plus de 20 000 articles au total, dont 4000 références de locomotives. Sur la gauche, une piste de 2 mètres pour tester wagons et fourgons. A l’étage, de l’outillage (pinces, forets, perceuse), des entrées de tunnel, quais et grillage, paysages de montagne pour agrémenter le parcours.

Patrick est entré au Petit Train bleu comme apprenti. Il n'en est jamais parti. Photo Marion Saive/ Le Progrès

Patrick est entré au Petit Train bleu comme apprenti. Il n'en est jamais parti. Photo Marion Saive/ Le Progrès

Patrick, entré comme apprenti dans le magasin en 1975 alors qu’il avait 15 ans, n’a jamais quitté les lieux. L’immuable employé en a désormais 59. « Mon CV est vite fait, il tient en une ligne ! » plaisante l’homme à la barbe grisonnante, derrière son comptoir-pharmacie.

« Je ne peux pas conduire
les grands, tant pis, je conduirai
les petits trains »

Depuis plus de quarante ans, Patrick conseille ses clients, les avertit des locomotives parues en série limitée, discute maquettes et circuits. Son amour des trains l’habite depuis l’enfance, quand il se rendait chez sa grand-mère, rue Pierre-Sémard à Oullins, et qu’il passait des heures à regarder passer les trains depuis le passage à niveau. Il avait d’ailleurs saisi sa chance aux ateliers SNCF de la Mulatière. Un mauvais souvenir. « Ils m’ont lâché : ‘’Tu portes des lunettes, tu ne conduiras jamais de trains’’», se rappelle Patrick, encore marqué. « Dans le même temps, j’apprenais que Le Petit Train bleu cherchait un apprenti. Je me suis dit : ‘’Je ne peux pas conduire les grands, tant pis, je conduirai les petits trains », dit-il, en rangeant une locomotive à vapeur dans une armoire compartimentée.

Une référence pour les Lyonnais

Grâce à une poignée de fidèles, le commerce vivote. Le modélisme ferroviaire est un marché de niche. Onéreux, de surcroît. « Ce n’est pas un loisir pour enfants. Notre clientèle initiale, plutôt aisée, a vieilli. Beaucoup sont décédés. Ce gros pouvoir d’achat est devenu peau de chagrin. Les trains miniatures sont devenus des objets convoités par les collectionneurs, donc très coûteux », regrette Patrick, qui s’émerveille toutefois en sortant de son emballage une « Crocodile », locomotive suisse recouverte d’or fin 24 carats, sortie à 3500 exemplaires dans le monde. Valeur : 1000 euros.

Les clients se font plus rares. Mais le Petit Train bleu reste une référence dans le quartier. « Le magasin est tellement ancré dans le paysage lyonnais que les locaux s'en servent comme point de repère pour se donner rendez-vous ! »

> Le Petit train bleu, 7 rue de la Charité, Lyon 2e. Ouvert du mardi au samedi de 10h30 à 12h30 et de 14 à 19 heures. Plus d'infos sur https://www.lepetittrainbleu.fr

Au n°19

Petit Grain :

un billet pour le Vietnam 

Le Petit grain, c’est un restaurant asiatique. Mais c’est avant tout l’histoire d’un homme, Olivier Tran, débarqué de son pays natal, le Vietnam, en 1972.

Le jeune homme de 19 ans s’inscrit à Besançon en licence de langues appliquées. Poursuit sa maîtrise à Lyon, quai Claude Bernard. En 1975, Saïgon tombe sous le contrôle communiste. Olivier décide de rester à Lyon. « La vie y était douce. Au Vietnam, tout le monde fuyait comme des rats. Je n’allais pas rentrer dans la gueule du loup », raconte l’homme au rire facile, 66 ans désormais.

Olivier, 66 ans, a quitté son Vietnam natal en 1972. Photo Marion Saive/Le Progrès

Olivier, 66 ans, a quitté son Vietnam natal en 1972. Photo Marion Saive/Le Progrès

Dans cet antre de la mode, Jean Moulin venait y porter le courrier aux Résistants

La vingtaine, il ouvre un premier restaurant rue Laurencin, « Grain de riz ». A quelques pas de là, il fait la rencontre d’Hélène Leynaud, une modiste qui tient boutique, rue de la Charité. Olivier tombe amoureux des lieux - la vitrine des années 30, les boiseries, les recoins escarpés - mais surtout de l’histoire qui imprègne ses murs : c’est dans cet antre de la mode que Jean Moulin venait porter le courrier aux Résistants. Alors quand cette amie part à la retraite, Olivier rachète le magasin pour ouvrir son nouveau restaurant, « Petit Grain ».

A l’heure du midi, on ne voit que lui. On entend que lui. « Comment tu vas ma belle ? Ah tu es pressée ? Ok, assieds-toi là, on va te faire une soupe », débite Olivier, en tenant ses clientes par la main. Bonnet retroussé sur le crâne et banane à la taille, il enchaîne les allers-retours des cuisines à la salle. Ses virevoltes donnent vie aux moineaux imprimés sur son veston.

L’atelier de mode a bien changé, même si Olivier a conservé les boiseries et la vitrine - « J’ai promis à Hélène de ne jamais y toucher ». Une première salle lumineuse d’une dizaine de tables jouxte les cuisines. Aux murs, des pendules aux heures de Saïgon, Hong Kong, Montréal, Hawaï et Lyon, où vivent des membres de la famille d’Olivier.

Plus loin, une deuxième salle, plus grande et plus sombre, tapissée de paravents et armoires remplies de bibelots. Au fond, un passage permet d’accéder à deux petites pièces alambiquées. L’une, étroite et toute en longueur, rappelle les intérieurs de wagons. L’autre, déjà bas de plafond, est assaillie de plantes tombantes, charmante tanière pour les clients solitaires.

Une cuisine asiatique familiale
et authentique

En 35 ans, Olivier, aussi malicieux qu’attachant, a su fidéliser ses clients. Par son phrasé, sa douceur, son grain de folie. Chaque client avance ici en terrain ami. Qu’il soit familier ou non des lieux, le traitement sera le même : tutoiement, blagues et propositions de plats en fonction du stock. Ce midi-là, ce sera un bô-bun (« la salade lyonnaise de chez nous », comme la présente Olivier) accompagné d’un thé glacé maison et d’un gâteau au thé vert/lait de coco/graines de sésame en dessert, qu’Olivier a préparés chez lui à 6 heures ce matin-là. « De la cuisine asiatique familiale et authentique, qui se fait de plus en plus rare », résume-t-il.

« C’est un bouchon lyonnais façon vietnamienne »

Le Petit grain est une fourmilière. Un joyeux bordel organisé, orchestré par Olivier. Couples, groupes d’amis, collègues de bureaux sont installés sur de petites tables carrées massées contre les murs. Entre voisins de banquettes, les échanges vont bon train. Bien que forcée, la promiscuité se révèle plaisante. « C’est un bouchon lyonnais façon vietnamienne », s’amuse Olivier.

Il est 15 heures, les derniers déjeuneurs quittent les lieux - « Merci chérie, à bientôt », s’exclame Olivier. Il fait une bise à sa cliente et la ramène sur le palier. « Ici, c’est comme une famille. Si tu viens et que t’es pas bien, que t’es triste… Je vais prendre soin de toi, te bouger, te changer les idées », dit-il, en pliant ses serviettes. Le service du midi à peine fini, Olivier a déjà trouvé de quoi s’occuper.

> Petit Grain, 19 rue de la Charité, Lyon 2e. Ouvert du lundi au samedi de 10 à 18 heures. Tél. 04 72 41 77 85.

Marion Saive/Le Progrès
Photo Marion Saive/Le Progrès

Au n°23

Joly Moods :

en quête d'une perle rare
dans la caverne d'Ali Baba

Paniers et luminaires en osier, palmier et raphia, miroirs en laiton, banquettes, tabourets, ustensiles de cuisine en bois de noyer, d’amandier et de citronnier, poteries, tapis de 2 mètres sur 3 accroché au mur en guise de tenture, babouches bleues… Le seuil de Joly Moods franchi, on déambule dans la caverne caverne d’Ali Baba.

Après plusieurs années en tant qu’éditeurs déco au Maroc, et leurs filles ayant quitté le nid, Anne-Marie et Mohamed sont revenus à leur cœur de métier : la décoration d’intérieur. Le couple a ouvert cette boutique aux mille merveilles en mars 2018, rue de la Charité. On trouve ici tout un tas de petits meubles, d'éléments de maroquinerie, de textile, linge de maison et d'ustensiles, la plupart issus du Maroc, où le couple a installé un atelier pour fabriquer ses créations maison.

Avis aux amateurs, Joly Moods est la seule boutique à Lyon où vous pourrez trouver la peinture bleu Majorelle, pour redonner du peps à votre petit mobilier (comme à gauche, sur les pieds de ce banc).

Avis aux amateurs, Joly Moods est la seule boutique à Lyon où vous pourrez trouver la peinture bleu Majorelle, pour redonner du peps à votre petit mobilier (comme à gauche, sur les pieds de ce banc).

« Le tapis, c'est le premier élément de décoration dans les foyers maghrébins »

Le long du mur, plusieurs dizaines de tapis marocains sont empilées, en laine de chèvre ou mouton, provenant d’une douzaine de régions du Maroc - Azilal, Beni Ouarain, Talsint, Kilim, M’rirt, Boucherouite, Boujaad… « Le tapis, c’est le trésor des familles marocaines. C’est un objet fonctionnel car isolant, et le premier élément de décoration dans les foyers maghrébins. L’amour des tapis, c’est génétique chez mon mari, c’est lui qui me l’a transmis », raconte Anne-Marie, yeux bleus et blazer noir, en dépliant un modèle Beni Ouarain aux losanges gris et motifs colorés. « C’est un livre ouvert pour les tisserands marocains, analphabètes pour la plupart : ils s’expriment à travers leurs tapis », dit-elle en pointant du doigt tout un tas de symboles et figures. « Certains sont vintage, ils ont plus de cinquante ans et présentent des mots d’hébreu, témoignant de la présence des juifs au Maroc. »   

Pour le reste, des bougies bretonnes, des sabots suédois, des coussins et draps indiens, des vêtements allemands à l’esprit rétro, des souliers pour enfants en laine feutrée, des boîtes à pique-nique et paniers de vélos en palmier…

Au fond du magasin, un coin « matériauthèque », où retrouver les peintures écologiques et les papiers peints anglais Little Green. Mais aussi des zelliges (carreaux de faïence en terre cuite marocains biseautés à la main) d’une vingtaine de coloris, pour réaliser des crédences de cuisines et salles de bain.

Anne-Marie devant sa "matériauthèque".

Anne-Marie devant sa "matériauthèque".

> Joly Moods, 23 rue de la Charité, Lyon 2e. Ouvert du mardi au samedi de 10 à 19 heures. Site Internet : https://www.jolymoods.com

Au n°80

La Progressive
Drum School :

apprendre à jouer de la batterie
en s'amusant

Au 80, rue de la Charité, les non avertis ne prêtent pas attention au panneau rouge de la « Progressive Drum School ». Il faut franchir la voie d’accès au parking de l’hôtel de Savoie, se diriger au fond à gauche de la cour, emprunter un escalier en colimaçon pour atteindre l’antre de cette école de batterie créée en 1996.

Le souterrain gagné, les décibels s’échappent de la salle de musique confinée. Les notes de « Never too much » de Luther Vandross résonnent. Un homme sort du cours collectif, jean basket et t-shirt noir à manches courtes laissant entrevoir des tatouages. Il retire ses bouchons d’oreille. C’est Philippe Jeoffroy, le fondateur de l’école.

Philippe, fondateur de l'école, et Yves, un ancien élève qui dispense maintenant les cours hebdomadaires. Photo Marion Saive/Le Progrès

Philippe, fondateur de l'école, et Yves, un ancien élève qui dispense maintenant les cours hebdomadaires. Photo Marion Saive/Le Progrès

Le batteur pro a saisi les baguettes à six ans. Est entré au Conservatoire à 13 ans, a suivi les CHAM (Classes à horaires aménagés musique), puis un bac musique - « Le F11, on disait à l’époque », se souvient l’homme de 47 ans), avant de partir à Los Angeles sur les traces du célèbre percussionniste de jazz américain Joe Porcaro, la majorité à peine soufflée. « Là-bas, j’ai peaufiné mon style bluegrass. »

« A la Drum School, il n’existe pas de niveaux. Les élèves viennent là pour jouer et s’éclater »
Philippe Jeoffroy

De son expérience Outre-Atlantique, il est revenu avec des méthodes de travail et d’enseignement éloignées des « basiques français solfège - conservatoire - concours ». « En France, l'apprentissage de la musique est trop axé sur la théorie. Aux Etats-Unis, on apprend à développer sa personnalité plus que sa technicité. J’avais envie de reproduire ce concept. A la Drum School, il n’existe pas de niveaux. Les élèves viennent là pour jouer et s’éclater. Ça arrive qu’un gamin progresse vite et avance comme ça », indique Philippe en maintenant une de ses baguettes à l’horizontale, dans le vide. Il positionne la deuxième baguette un peu plus haut : « Mais c’est possible que son copain, qui peine plus que lui à un certain stade, le rattrape plus tard. Il ne faut pas les brusquer. »

« Je prends mon pied à être sur scène, à donner des concerts, mais aussi à partager mon savoir et mon expérience avec mes élèves. Je ne me considère pas comme un prof de batterie. Je n’ai pas de cours type, je m’adapte à mon élève. »

Yves, ancien élève devenu bras droit de Philippe dans son école de batterie à Lyon, dispense les cours hebdomadaires, collectifs (maximum 4 personnes) ou individuels.

120 élèves de 5 à 61 ans

Des écoles de musique américaines, il a aussi gardé la façon de les agencer. La Drum Progressive school dispose de trois salles de cours, de box de travail confinés en libre accès pour les adhérents, d'une scène de concert de 15m² pour les représentations de batteurs pros et master class, d'espaces aménagés de pads et batteries électroniques, et d'un espace détente.

Plus de vingt ans après sa création, l’école en sous-sol de 400 m² accueille 120 élèves, de 5 à 61 ans, du lundi au samedi. Philippe, basé à Paris, passe les lundis et mardis donner cours aux sept élèves inscrits en formation professionnelle - un programme intensif de dix mois visant à se perfectionner et établir un projet professionnel.

Les lundis et mardis, Philippe descend de Paris pour donner cours aux élèves qui suivent la formation professionnelle à la Progressive Drum School de Lyon.

Et le concept plait... A tel point que Philippe l’a dupliqué à Dijon, Clermont-Ferrand, Belfort et Amiens. Une cinquième antenne doit ouvrir à Paris d’ici quelques mois. Comme à chaque fois, Philippe placera un de ses anciens élèves à sa tête. Qui de mieux pour prendre la relève et recopier le modèle à l'identique.

>  Progressive Drum School, 80, rue de la Charité, Lyon 2e. Plus d’infos et tarifs : http://www.progdrum.com/ecole-batterie-lyon/cours-batterie-lyon/

Au n°44

Le Lyon qui tricote :

...et qui coud !

A l’angle des rues des Remparts-d’Ainay et de la Charité, on entre dans le temple du tricot lyonnais. Agnès Dominique a créé sa boutique-atelier il y a dix ans dans le quartier.

Sacs, pulls, capes et bandeaux en laine pendus au bout d’une corde, sont présentés en vitrine. Le long des murs, plusieurs centaines de pelotes multicolores sont rangées dans des bibliothèques-casiers. Laine, acrylique, yack, raphia, viscose, bambou, eucalyptus… Plus de 200 qualités différentes pour plusieurs milliers de références. Fils de couture, aiguilles, magazines et rubans sont dispersés dans le magasin. A gauche, des tables de jardin vert citron et chaises aux assises laineuses attendent les clientes fidèles du café-tricot. 

« Le garagiste démonte les moteurs de voiture, moi, je démonte les pulls. »

Styliste-modéliste de métier, Agnès a toujours travaillé dans la maille. La jeune femme montée à Paris pour suivre la formation haute couture de la Chambre syndicale a fait du chemin. Une expérience chez Modes et Travaux où elle a créé ses patrons tricot, deux collections pour la marque spécialisée dans la maille de luxe Lil pour l’autre, dix ans dans les usines marocaines à établir des fiches tricot sur mesure… A 20 ans, Agnès se mettait à son compte. 45 ans plus tard, elle reste une référence de la maille. « Je suis la dernière en France qui sache refaire une pièce unique : plutôt que de relancer un atelier de production pour un pull, les gens font appel à moi pour recréer le même modèle. Je connais exactement la laine et les techniques qui ont été utilisées pour réaliser tel ou tel vêtement. Rien d’extraordinaire en soi : le garagiste démonte les moteurs de voiture, moi, je démonte les pulls. »

Agnès Dominique travaille dans la maille depuis plus de 45 ans.

Agnès Dominique travaille dans la maille depuis plus de 45 ans.

« Entre 15 et 18 000 personnes visitent mon site chaque mois. Et sans avoir dépensé un centime pour être référencée », indique la femme aux yeux bleus et cheveux gris ombrés avec fierté. Outre l’achat de pelotes de laines et petit outillage tricot et crochet, c’est l’activité de « stoppage » qui attire bon nombre de clients au Lyon qui tricote. Plutôt que de jeter leurs pulls troués, ils lui confient afin qu’Agnès les répare. Ni vu ni connu, le vêtement est comme neuf.

La pile de vêtements abîmés ou troués qui attendent d'être repris par Agnès pour paraître comme neufs.

La pile de vêtements abîmés ou troués qui attendent d'être repris par Agnès pour paraître comme neufs.

«Le tricot, c’est le yoga du cerveau»

Par manque de temps, Agnès ne tricote presque plus – « Je me fais des cures pendant mes vacances quand je ne suis pas débordée » -, mais elle conçoit toujours ses modèles de pulls à fines ou grosses mailles, dont elle confie la réalisation à ses tricoteuses. Quand elle ne reprend pas les habits, la grand-mère de deux petites-filles donne des cours de couture et tricot l’après-midi (sauf le mercredi). « Infirmières de bloc opératoire, psychothérapeutes… Beaucoup viennent se vider la tête chez moi. Le tricot, c’est le yoga du cerveau. »

D’ailleurs, il est 14 heures, et ses trois élèves du jour débarquent dans la boutique. Chacune est équipée de sa fiche tricot et d’un carré de mailles au bout de ses aiguilles. Direction l’étage, au milieu des piqueuses et surjeteuses, pour une séance de 2 heures. Dans la salle aux parois vitrées, les quatre femmes ont vue sur le carrefour agité. Après un rapide tour de table pour connaître les prénoms et ambitions de chacune - « On va se tutoyer, hein ? suggère Agnès en faisant tinter ses bracelets en or sur le plan de travail -, la professeure lance les hostilités : « Allez mesdames, tricotons ! »

Lors d'un atelier tricot de 2 heures, les novices apprennent le point mousse, soit les rudimentaires du tricot. Les plus confirmées se lancent dans des réalisations de pulls ou robes pour bébés en point jersey.

> Le Lyon qui tricote, à l'angle des rues de la Charité et Remparts d'Ainay, Lyon 2e. Tél. 09 82 21 88 52. Plus d'informations sur les tarifs et ateliers sur le site Internet : http://lelyonquitricote.com

La rue de la Charité, vers 1894-1920. Photo Archives municipales de Lyon (réf: 4 FI 1018)

Ecole de Commerce en 1910, rue de la Charité (au n°34 en lieu et place de l'actuel Musée des Tissus). Photo Archives municipales de Lyon (réf: 4 FI 1019)

Chapelle de la Charité. Photo d'archives (transmise par Philippe Bitat - Café de la Cloche)

Hospice de la Charité vers 1894-1920, service du Dr Chatin : la couveuse. Photo Archives municipales de Lyon (réf: 4 FI 3520)

La rue de la Charité, vers 1894-1920. Photo Archives municipales de Lyon (réf: 4 FI 1018)

Ecole de Commerce en 1910, rue de la Charité (au n°34 en lieu et place de l'actuel Musée des Tissus). Photo Archives municipales de Lyon (réf: 4 FI 1019)

Chapelle de la Charité. Photo d'archives (transmise par Philippe Bitat - Café de la Cloche)

Hospice de la Charité vers 1894-1920, service du Dr Chatin : la couveuse. Photo Archives municipales de Lyon (réf: 4 FI 3520)

Hôpital de la Charité entre 1894 et 1920. Photo Archives municipales de Lyon (réf: 4 FI 1031)

Hôpital de la Charité entre 1894 et 1920. Photo Archives municipales de Lyon (réf: 4 FI 1031)

Le journal Le Progrès est né à la Charité

Pour la petite anecdote historique, il faut savoir que l'histoire de notre journal Le Progrès a débuté à la Charité.

C’est dans cette imprimerie, place de Charité, que Le Progrès a été fondé.

C’est dans cette imprimerie, place de Charité, que Le Progrès a été fondé.

Le lundi 12 décembre 1859, Jean-François Chanoine, maître imprimeur à Lyon, sort le premier numéro de son journal, titré Le Progrès.

C’est sur une presse de ce type, marque Marinoni, que la première édition du Progrès a été tirée en 1 000 exemplaires. Photo Musée de l’imprimerie et de la communication graphique, tous droits réservés

C’est sur une presse de ce type, marque Marinoni, que la première édition du Progrès a été tirée en 1 000 exemplaires. Photo Musée de l’imprimerie et de la communication graphique, tous droits réservés

Mille exemplaires sont empilés sur sa charrette qu'il tire à bout de bras. Tous ces numéros ont été composés à la main et tirés sur des machines bruyantes installées au sous-sol de l’hôpital de la Charité.

Mai 1894, la salle de rédaction du Progrès, dans les bureaux de la place de la Charité, à Lyon.

Mai 1894, la salle de rédaction du Progrès, dans les bureaux de la place de la Charité, à Lyon.

En 1881, Le Progrès déménage. Il quitte l’hôpital de La Charité pour un ancien théâtre situé rue de la République (l'actuelle Fnac). Le journal déménagera ensuite rue Ferrandière, avant de revenir dans le quartier, rue de la Charité. Le Progrès quittera les locaux en 2000 pour la rue Servient, avant de s'installer à Confluence en 2007.

Au n°39

Fromagerie Mons :
la crème de la crème

Quinze. C’est le nombre d’antennes de la fromagerie Mons à travers le monde. Oui, car la famille de fromagers auvergnats, qui avait commencé à vendre ses produits laitiers fermiers sur les marchés roannais dans les années 1960, s’est bien développée depuis. Et compte même trois points de vente en Angleterre et deux en Suisse.

Une renommée en grande partie due aux deux fils : Hervé Mons, Meilleur Ouvrier de France en 2000, et Laurent, qui ont propulsé l’entreprise familiale, dont les caves d’affinage sont toujours établies à Saint-Haon-le-Châtel (Loire), sur la scène internationale.

Séverine, originaire de Lorraine, est en charge de la fromagerie Mons, rue de la Charité.

Séverine, originaire de Lorraine, est en charge de la fromagerie Mons, rue de la Charité.

Rue de la Charité, c’est la pétillante Séverine qui accueille les clients dans cette belle échoppe murée de bois clair. La quadragénaire a pris les commandes de cette boutique lyonnaise en 2014, après avoir vendu des chaussures puis tenu un restaurant avec son mari à Nancy. « On se fournissait déjà chez Mons pour nos fromages, et lorsque l’on a vendu, les deux frères m’ont proposé de prendre en charge ce magasin. » La Lorraine ne regrette pas sa Lorraine. « Je me sens comme chez moi ici, les enfants du quartier me disent ‘’bonjour la fromagère’’ en passant, il y a une belle entente entre tous les commerçants », se ravit la femme aux cheveux courts et lunettes orange à grosses montures.

Hervé Mons, Meilleur Ouvrier de France en 2000, dans ses caves d'affinage ligériennes. Photo Philippe Vacher/Le Progrès

Hervé Mons, Meilleur Ouvrier de France en 2000, dans ses caves d'affinage ligériennes. Photo Philippe Vacher/Le Progrès

Chèvre persillé, Castillon du Lubéron, bleu 1924 entre lait de vache et chèvre, chèvre du Rove très gras et goûteux… « Hervé aime trouver les petits fromages rares que personne n’a l’occasion de goûter, pour les faire découvrir à sa clientèle. Il se lance aussi dans des créations personnelles, comme ce brie mascarpone-basilic, très sympa avec un verre de rosé pour l’été », explique Séverine en pointant du doigt le fromage crémeux à l’entremet vert. « Le fromage, c’est un super produit de fin de repas, qui permet de mettre en valeur toutes les régions de France ».

Yaourts maison bio, vins, charcuterie et terrines de son mari viennent compléter les étalages. Sur place, un coin restauration avec des mange-debout pour déguster quelques ardoises de fromages et cochonnailles, que les clients peuvent accompagner d’un verre de vin.

Rue de la Charité, on ne manque de rien

Fabrice Bonnot, chef du restaurant Cuisine et Dépendances (68, rue de la Charité), préside l'association des commerçants de la rue de la Charité depuis un an. Celle-ci compte 90 adhérents.

Fabrice Bonnot, président de l'association des commerçants de la rue de la Charité et chef du restaurant Cuisine et Dépendances, au n°68 de la rue. Photo Marion Saive/Le Progrès

Fabrice Bonnot, président de l'association des commerçants de la rue de la Charité et chef du restaurant Cuisine et Dépendances, au n°68 de la rue. Photo Marion Saive/Le Progrès

« Depuis cinq ans, la Charité redevient l'une des rues les plus commerçantes de Lyon. En termes d'artisanat, de savoir-faire... elle est très variée. On compte quatre cavistes, de nombreux restaurants, que ce soit des crêperies, des pizzerias ou des gastronomiques, un boucher (BLO) et un fromager (Mons) reconnus, des épiceries fines... Il fait vraiment bon vivre dans cette rue. »